Expédition au nord Mozambique (3)

Publié le par Jérôme Voyageur

Lundi 23 octobre 2006, Ile de Mozambique

 

 

L’heure de quitter l’île a sonné. De ce fait, l’heure du réveil a été avancée pour pouvoir partir tôt. De toute façon, nous sommes toujours réveillés bien avant. Une fois les tentes pliées et le petit-déj’ avalé, nous reprenons la route en sens inverse. Il faut en effet revenir sur nos pas pour récupérer la route qui monte vers le nord.  En chemin, nous apercevons de nouveau les salines, et de nouveau, manguiers, anacardiers (arbre à cajou), bananiers, papayers, cocotiers et quelques frangipaniers. Les sacs de charbon et les tas de bois sont toujours en vente au bord de la route. Parvenus à Namialo, nous déposons Elena qui voyageait avec nous et obliquons plein nord, direction Pangane. C’est toujours une route goudronnée donc roulante, mais quelques nids de poule sont en train de la dégrader. Cette partie Nord de la région de Nampula semble moins densément habitée ; du coup, les brûlis sont aussi moins nombreux. L’habitat me semble un peu différent avec ces toits qui dépassent des parois des cases, retenus par une série de poteaux formant ainsi une avancée sur tout le pourtour.

 

En cette fin de ramadan, nous croisons de nombreux groupes de fidèles, autour des petites mosquées, mais aussi en processions très colorées, souriantes et joyeuses derrière un drapeau, au bord des routes. Nous franchissons aussi de nombreux ponts sous lesquels rien ne coule plus ! A part du sable ! Enfin jusqu’au Rio Lurio. Son large lit est loin d’être immergé mais néanmoins l’eau s’écoule. Du coup, il y a beaucoup d’animation entre la baignade, la toilette et la lessive. Ce fleuve marque aussi notre entrée dans la région de Cabo Delgado qui s’étend jusqu’à la frontière tanzanienne. Petit à petit, la végétation change. De nouvelles espèces d’arbres qui me sont inconnues apparaissent à la place des précédentes. Arrivés à Metoro, nous prenons la direction de Pemba pendant quelques kilomètres, jusqu’au village de Sunate où nous reprenons notre route vers le nord, et ce jusqu’à Macomia. C’est là que s’arrête la route pour nous : désormais, nous devons affronter une piste de latérite vers l’océan, plus précisément jusqu’au village de Mucojo. On retrouve là la vraie piste africaine, plus ou moins roulante suivant les endroits. En chemin, nous apercevons quelques babouins dans les arbres. L’un d’eux semble faire des mouvements d’étirements perché dans son arbre, tel un humain ! Plusieurs fois, nous trouvons des bouses d’éléphants bien sèches sur la piste mais aucune trace du mammifère.

 

A Mucojo la piste se termine. Il faut alors continuer tout droit plein est en suivant le panneau Pangane. S’ouvre alors une piste étroite et sablonneuse. Nous sinuons ainsi entre les arbres, dont beaucoup sont recouverts par une plante parasite qui donne l’impression qu’ils sont chevelus. Puis rapidement, nous abordons une immense cocoteraie. Nichées à l’ombre, un grand nombre de cases occupe le terrain. Il s’agit de villages de pêcheurs qui vivent de ce que la mer leur fournit. Et elle semble généreuse par ici. Nous finissons par apercevoir les eaux turquoises de l’océan. Le mélange des couleurs est splendide avec le bleu azuréen du ciel et le dégradé de verts des cocotiers. Ainsi, nous traversons alternativement zones sauvages et petits villages. Non loin de Pangane, nous apercevons quelques bateaux de pêche amarrés, une petite île est posée non loin du continent. Sur la rive, les pêcheurs vaquent à leurs occupations : certains réparent les filets, d’autres négocient le produit de leur pêche, d’autres encore mettent le poisson à sécher sur des étals. L’odeur est loin d’être du Chanel !!

 

Finalement, nous commençons à distinguer la presqu’île, but de notre étape. Le cadre est paradisiaque : la langue de sable se rétrécit petit à petit. Océan à droite et à gauche, cocotiers au centre. Nous arrivons ainsi au bout de la partie circulable de la presqu’île, au-delà, c’est de la roche, ou plutôt du corail. C’est là que nous nous installons dans le camp sommaire prévu à cet effet. Après avoir rapidement monté la tente, un bain paraît indispensable dans une eau toujours aussi claire et aussi chaude. Un vrai bonheur ! Après ce petit rafraîchissement, je pars marcher pendant une petite heure sur l’extrémité plus sauvage de la presqu’île. C’est là que j’observe un rollier à longs brins puis une aigrette. J’ai l’impression que le rollier joue avec moi : il me laisse approcher à bonne distance mais un pas de plus et il décolle pour se poser un peu plus loin ; j’avance de nouveau et le manège recommence jusqu’à ce que la végétation m’empêche de poursuivre. Les rives faites de coraux érodés paraissent pour le moins acérées. Heureusement qu’au camp il y a une plage de sable fin quasiment blanc.

 

Ce soir, nous allons profiter des bienfaits de la mer. La femme du propriétaire du camp nous a concocté un riz à la coco avec du barracuda grillé : elle est pas belle la vie ? La nuit le sera un peu moins avec la visite d’un rôdeur qui essaiera d’ouvrir une tente, en trouera une autre et sera à deux doigts de dérober un sac. Mais finalement, tout s’est bien terminé et nous serons encore plus vigilants pour les jours à venir.

 

 

Mardi 24 octobre, Pangane

 

 

Après cette nuit un peu agitée, nous nous levons sans réveil. Aujourd’hui, c’est quartier libre. Chacun se lève à son rythme. Après la réparation de ma moustiquaire, nous équipons les tentes avec le surtoit par sécurité.

 

Je choisis ce matin de tenter d’atteindre l’île qui fait face au village. Mais en attendant que la marée descende suffisamment et dévoile le banc de sable permettant le passage, je commence par remonter vers le village d’abord sur la rive nord, puis rapidement sur celle sud. En cette fin de ramadan, il y a peu d’activité. Peu de gens sont visibles. Quelques pêcheurs ravaudent leurs filets, assis sous les cocotiers, non loin de la plage. Quelques personnes passent avec leurs récipients d’eau hétéroclites. Les gens que je croise se dirigent pour la plupart vers la mosquée pour célébrer l’Aid El Fitr. La marée n’étant pas à l’heure annoncée, je finis par m’asseoir sur un mât posé négligemment à l’ombre d’un filaos. Là, je peux écrire tranquillement, bercé par le bruit de l’eau, et inspiré par les couleurs turquoises. Après quelques longues minutes, un groupe d’enfants finit par s’approcher. Ils semblent particulièrement intrigués par le fait que j’écrive mais ils ne sont pas gênants ; ils discutent entre eux, assis juste à côté.

 

Finalement, je reprends mon chemin en descendant sur la plage qui commence à être bien découverte à présent. Je tente une première traversée en utilisant le premier banc de sable apparu. Je finis par avoir les chevilles dans l’eau, puis, petit à petit, le niveau d’eau monte aux mollets puis aux cuisses. Je suis contraint de rebrousser chemin sous peine d’être trempé. Du coup, je continue à me balader le long de l’océan jusqu’à apercevoir un nouveau banc de sable qui semble plus important. Pourquoi ne pas réessayer ?

 

Quelques aigrettes bleues sont déjà en train de se régaler de tout ce que le reflux de l’eau a dévoilé. La progression semble être possible. Tout ne se fait pas à pied sec mais au pire l’eau arrive aux chevilles. C’est là que j’aperçois à plusieurs reprises des crabes qui semblent porter un camouflage pour qu’on les confonde avec le sable. Dès que le sol vibre à mon approche, ils effectuent une vive marche arrière et disparaissent dans le sable. J’ai même la chance de pouvoir observer une anguille d’environ cinquante à soixante centimètres, toute tachetée. Elle se meut tranquillement dans ce filet d’eau. Alentour, d’autres oiseaux se régalent. J’en compte une bonne vingtaine. Finalement, après une bonne demi-heure de marche, je finis par atteindre l’île visée. A part la langue de sable qui en descend sur le côté, le reste des rives semble être intégralement rocheux et découpé. Je commence d’abord par monter dessus car j’ai aperçu quelques cases. Il y a comme un petit village avec une allée bien marquée (et bien propre) ainsi que des plantations à peu près ordonnées. Mais l’endroit semble complètement désert (apparemment, il s’agirait d’un projet de lodge qui peine à obtenir les autorisations). Rapidement, je retourne sur le bord de l’île pour essayer de la contourner. Le sol est presque totalement rocheux, enfin une sorte de corail érodé par la mer. L’espace semble se partager entre les crabes et quelques lézards qui osent s’aventurer en terrain desséché. De nombreux coquillages coniques occupent les trous d’eau près de l’île. Quelques oiseaux s’envolent dès que j’essaie de les approcher pour les identifier.

 

Incertain des horaires exacts de la marée, je préfère rebrousser chemin avant d’être bloqué par la marée haute. Les oiseaux sont encore plus nombreux : encore des aigrettes bleues mais aussi deux ibis sacrés qui semblent bien mal en point à en voir leur plumage. Dans un filet d’eau, une méduse de quelques centimètres cherche à progresser. Enfin, je parviens à la plage. La température se fait bien sentir sur la terre ferme (enfin, le sable !). Le village ne semble guère plus animé hormis peut être que je vois un peu plus de monde. Néanmoins, la vie tourne encore au ralenti. Le dernier tronçon du chemin est particulièrement suffocant sur les coups de onze heures. D’ailleurs, notre camp tourne lui aussi au ralenti : la plupart sont étendus à l’ombre. Boire est indispensable sous peine de déshydrater : et le goût de l’eau passe assez vite avec le jus de fruit (rapidement, je m’y habitue et n’y fait même plus attention). Le repas, pris sous l’auvent d’une des cases destinées aux visiteurs, sera ponctué par des pâtisseries offertes Hachim , le propriétaire ; des spécialités de la fin du ramadan. Ensuite, chacun cherche un coin de fraîcheur pour se reposer et passer l’heure chaude. Et ce sont les paillotes qui offrent finalement le meilleur résultat !

 

Vers 14h30-15h, lorsque la chaleur faiblit  un tout petit peu, je me décide à aller prendre un bain qui fait le plus grand bien avec cette chaleur. Le meilleur est finalement lorsqu’on sort de l’eau et que le vent donne cette impression de fraîcheur sur la peau. Je récupère alors masque et tuba pour essayer de voir quelque chose. Rien à signaler sur le fond sablonneux hormis quelques coquillages en promenade. J’essaie alors de me rapprocher des rochers avec un peu d’espoir. Sauf qu’en apercevant de tout petits poissons, je tombe nez à nez avec une méduse, le même genre que le matin. Souhaitant éviter tout contact je recule prestement ; mais je finis par en retrouver une plus loin et je finis par arrêter. C’est en revenant vers le bord que je vois Inno dans l’eau : je crois bien que c’est la première fois. Encore une fois, il me soutient qu’il ne flotte pas (la faute à des os trop lourds !) alors que je lui prouve le contraire. Je finis par essayer de l’aider avec ma main lorsqu’il tente de faire la planche. Mais dès que je la retire, il panique immédiatement et c’est fini. Du coup, nous continuons à barboter avant de nous promener sur la plage. En même temps que nous discutons de choses diverses, il ramasse les plus beaux coquillages pour les ramener au Zimbabwe et prouver que cela existe Nous marchons ainsi un long moment, croisant de nombreux petits crabes qui déguerpissent dans leurs trous à notre approche. C’est sympa de passer du temps comme ça avec Inno, chacun apprenant de nouveaux mots de l’autre, et enrichissant sa culture au contact de l’autre. Vraiment un bon moment !

 

En ce qui concerne les repas, autant il était très en avance hier, autant aujourd’hui, il est un peu en retard, nous laissant le temps de prolonger l’apéritif. Mais cela valait la peine. Le riz est toujours le même avec sa préparation à la coco. En revanche, l’accompagnement est succulent : du calamar frais débité en morceaux et cuit dans une sauce ; un vrai régal !

 

 

Mercredi 25 octobre, Pangane

 

 

Contrairement à la précédente, cette nuit a été bien calme, mis à part le chien du voisin qui a aboyé quelques fois. Aujourd’hui, nous devons être prêts à six heures. Fred nous a programmé une sortie en mer. Mais cette fois, elle sera authentique : pas de barque à moteur. Nous nous rendons donc côté village. Il nous faut à peine quelques pas pour traverser l’étroite langue de sable. Et atteindre une des premières embarcations amarrées sur la plage. Nous allons embarquer à bord d’un dhow, l’embarcation traditionnelle ici au Mozambique. En principe, ces bateaux servent pour la pêche mais exceptionnellement, aujourd’hui, elle va servir à promener les touristes. Nous montons à bord du Shukuran (Choukrane : merci en arabe ; il faut préciser que la plupart des pêcheurs de Pangane sont de confession musulmane). Enfin monter est un bien grand mot : chacun fait comme il peut pour grimper à bord,. L’équipage se compose de trois personnes : le capitaine et deux matelots. Pour embarquer, c’est chacun pour soi et surtout comme on peut, les premiers aidant les suivants : il n’y a ni quai, ni ponton et le bateau bouge, alors il faut entrer dans l’eau et parvenir à se hisser à bord. Une fois à l’intérieur, il faut se poser là où il y a de la place tant que la voile n’est pas hissée. Bien évidemment, il ne faut pas chercher de siège ou de banc. Non sans mal, tout le monde finit par embarquer et vogue la galère pour environ quatre heures.

 

La première opération consiste à hisser la voile fixée à une vergue aussi longue que le dhow, le tout à la force des bras et d’une poulie artisanale reliée au sommet du mât. Ceci fait, la voile et la vergue sont réglées à l’aide de cordage en fonction du vent. Mais pour sortir de la baie et prendre le vent, il faut d’abord pousser. Pour cela, le capitaine utilise une longue gaffe sur laquelle il pousse pour avancer. On comprend mieux leur gabarit avec des jambes fines mais des bras très musclés. Il pousse d’ailleurs tellement fort qu’à un moment la gaffe reste plantée dans le sable : il est alors obligé de plonger pour aller la rechercher puis revenir à la nage vers le bateau qui continue à avancer. Nous commençons par mettre le cap plein est pour passer entre la presque île et la petite île face au village (celle accessible à pied). Nous avons tout loisir  de constater que les eaux sont peu profondes : nous voyons presque toujours le fond. Ayant dépassé l’extrémité de la presque île, l’équipage met cap au nord en une savante manœuvre de la voile prestement exécutée. Désormais, nous voguons vers une autre île un peu plus grande appelée Macaloa ( ??). Il nous faut plus d’une heure pour l’approcher, simplement mus par le vent. Nous croisons ou dépassons des diverses embarcations toutes parties à la pêche. Il y a cette pirogue à balanciers avec sa petite voile moult fois rapiécée ; il y a cette autre pirogue toute simple contenant uniquement un filet. En fait, elle est attachée à la taille d’un plongeur qui est sous l’eau à la recherche de proie. C’est surprenant de voir avancer cette pirogue toute seule ! il y a aussi ces divers dhows ici et là, d’où montent des chants très rythmés pour accompagner l’effort d’une manœuvre.

 

La mer en elle-même nous offre un beau spectacle. L’éventail de couleurs est superbe. Nous passons d’un bleu sombre à un bleu vert pour finir, par endroits, au turquoise. Un vrai régal pour les yeux. Au bord de l’île, des plages de sable blanc apportent une nouvelle teinte sur fond de verdure. En approchant, nous apercevons des habitations. Tout d’abord des maisons en dur, mais en ruine, dont une aurait appartenu à Vasco de Gama (selon notre capitaine). Un peu plus loin, ce sont quelques cases et aussi quelques rares pêcheurs sur la plage. Mais globalement, l’endroit semble bien désert. Nous longeons ainsi ce bout de terre (ou de sable !!) jusqu’à dépasser l’île. Nous voguons ensuite vers le large. C’est là que les vagues commencent à se former, en plus du soleil qui chauffe ardemment. Il faut dire que seule la voile pourrait procurer un peu d’ombre mais tout dépend de son positionnement. Au bout d’un moment, voyant l’heure avancer, Fred fait comprendre au capitaine qu’il faudrait faire demi-tour. Sinon, nous pourrions passer plus de quatre heures sur l’eau. et voici le dernier virement de bord. Direction notre plage. Nous la voyons, elle n’est pas si loin ! Et pourtant ! Le vent se calme rapidement : résultat, le dhow n’avance quasiment plus. Bientôt, il va falloir se mettre à l’eau pour pousser !! D’un autre côté, avec la limpidité de l’eau,  nous pouvons essayer de voir au fond. Il n’y a guère que Fred et surtout Nadine qui aperçoivent des poissons. Rien pour les autres ! A croire qu’ils étaient imaginaires !

 

Soudain, une bise légère se lève, gonflant immédiatement la voile. C’est reparti ! En chemin, nous croisons à nouveau des dhows en pleine pêche. Plus près de la plage, nous remarquons d’abord quelques plongeurs affairés autour d’un filet, puis deux dhows. Ils sont en fait en train de mettre en place un filet au large avant de le tirer jusqu’à la plage : un genre de pêche à la senne. Plus près encore du bord, là où l’eau arrive au genou, un groupe de femmes s’affaire. De loin, elles semblent batifoler ! Mais à y regarder de plus près, elles sont elles-aussi en train de pêcher. Elles utilisent deux petits filets rectangulaires. A deux, elles tendent le filet tandis que les autres forment un grand cercle autour avant de se précipiter en faisant le plus de bruit possible vers le filet. Puis elles récupèrent ce qui s’est pris dans les mailles. Et le manège recommence ainsi un peu plus loin. Parmi elles, nous distinguons deux femmes macuas. Celles-ci ont la particularité de s’enduire le visage d’une crème blanche. Elles s’en font un masque tout à la fois de protection et de beauté. Mais il est loin d’être évident d’en faire des portraits.

 

La chaleur étant bien présente, nous nous empressons de nous tenir à l’ombre pour le repas et aussi pour la sieste. A ce moment de la journée, tout est calme, personne ne bouge beaucoup. Quand la chaleur se fait vraiment trop pesante, un petit bain d’eau de mer, quoi que chaud, fait le plus grand bien. Vers 15 heures, je me lance dans l’exploration de la pointe sauvage de la presque île. Sur le pourtour, à l’aplomb de la mer, le sol est très découpé. Il faut faire attention lorsqu’on marche mais c’est le seul moyen de suivre le bord puisque le chemin s’enfonce à l’intérieur des terres. Petit à petit, le terrain s’adoucit, et les buissons laissent place à des arbres. Quelques bûchers de coquillages intriguent de nouveau (nous apprendrons par la suite que c’est pour pouvoir les casser plus facilement en vue de construire les murs). Sur la droite, une première mangrove semble s’être asséchée. En revanche, la seconde, plus grande, est toujours en eau. de loin, j’y aperçois un ibis sacré au sommet d’un arbre. En approchant pour mieux le distinguer, je me rends compte qu’il y aussi cinq aigrettes blanches sur le même arbre, en train de dormir. Je m’éloigne un peu vers la pointe pas totalement recouverte par la marée qui monte. La courte langue de sable mène à un groupe de rochers coralliens déchiquetés à souhait. On peut observer aussi le croisement des deux courants débouchant des deux côtés de la presque île. Tout près, une petite plage fait face à l’île de ce matin. Je dérange cinq crabes roses qui semblaient vouloir traverser la plage en toute intimité mais que ma présence perturbe. Cette espèce semble vraiment craintive. Tout autant que les mini-crabes blancs qui détalent et s’enterrent dans la partie sèche de la plage. En reprenant ma promenade, je cueille une noix de coco qui n’était pas très haute ; malheureusement, malgré sa couleur jaune, elle se révèlera trop jeune et j’aurais droit aux moqueries d’Inno ! LA seconde moitié de l’île, du moins dans sa périphérie, est beaucoup moins arborée mais toujours aussi rocheuse. Dommage qu’il n’y ait pas eu plus d’oiseaux à observer. Probablement aurait il fallu s’enfoncer dans la végétation ? Quant au chacal aperçu la veille au soir au ras du camp, pas la moindre trace.

 

De retour au camp, personne : ils sont tous allés voir comment la femme  d’Hachim prépare le repas. Et ce soir, nous allons être servis : la fameuse langouste dont on avait tant entendu parler est au menu. Elles sont de toutes tailles mais toutes bien fraîches et bien bonnes. On entend plus que le bruit des mandibules à table. Nous sommes vraiment gâtés ! Nadine tente une chansonnette que nous arrêtons bien vite de crainte de voir la pluie arriver. On ne sait jamais ! En attendant, nous passons commande pour le repas du lendemain : c’est à la carte. C’est tout juste si on ne demande pas la taille de la « bête » désirée. Sur ce, une bonne nuit de sommeil nous attend : je ne tarde pas à dormir profondément, du sommeil du juste.

 

 

Jeudi 26 octobre, Pangane

 

 

Comme on pouvait le craindre, Nadine a fait venir la pluie. Elle fut courte mais suffisamment importante pour obliger à mettre le double toit ou seulement la raccrocher après le vent. Mais ce matin, chacun se lève comme il veut. Pas d’excursion programmée. Néanmoins, le réveil n’est pas très tardif : la chaleur montant vite, il n’y a pas de grasse matinée au programme.

 

En attendant la marée basse, chacun bricole dans son coin ; j’opte pour un rasage sur la plage face à la mer et sous les cocotiers : ça a une certaine gueule, il faut dire ! Vers huit heures, nous nous mettons en route ; le reste du groupe veut partir explorer l’île que j’avais visitée le premier jour. Pour cela, nous traversons l’intégralité du village. Depuis deux jours, il est bien plus animé. Un pêcheur nous montre le petit requin qu’il a attrapé. Plus loin, nous rentrons carrément dans le village pour y découvrir le marché. Il faut dire qu’il n’y a pas grand chose à y acheter, mais il a le mérite d’exister. Puis nous déambulons entre les cases. Je constate par dessus les clôtures que les cours intérieures semblent nickel, parfaitement balayées. Nous passons aussi devant la petite mosquée avant de récupérer la piste principale.

 

Quelques pas plus loin, une noix de coco tombe d’un arbre, puis une palme ! il s’agit non pas du vent mais d’un homme en train de faire sa cueillette. Il fera ainsi sur trois cocotiers d’affilée. Il réussit à grimper simplement équipé d’une boucle de corde qu’il bloque au niveau des chevilles et d’une machette dans la main droite. sa dextérité et sa facilité sont stupéfiantes. Et ainsi, il fait l’animation tant pour nous, touristes, que pour les autres villageois. Non content de cueillir, il entretient les cocotiers en les débarrassant des palmes sèches. Puis ce sont deux jeunes garçons qui finissent par nous suivre. Parvenus au point de départ de la ballade, les filles se lancent dans un foot improvisé avec les deux jeunes : une toute petite coco fait office de ballon ! Après leur avoir donné mes indications, je rebrousse chemin en revenant par la plage. De nombreux coquillages traînent sur le sable mouillé. Quelques oiseaux dont trois ibis sacrés se régalent au bord de l’eau. Les plongeurs au harpon partent eux aussi, à pied, vers l’île.

 

Arrivé à la presque île, je choisis de la contourner par la mer en profitant de l’espace dévoilé par la marée descendante. D’abord cassant et acéré, le sol finit par s’adoucir. De nombreuses mares se forment. La plupart du temps, on y trouve ces coquillages coniques ou aussi des crabes bien craintifs quoi que combatifs dès que j’approche (ils dressent leurs deux pinces vers le ciel, probablement pour tenter de m’impressionner !). Plus rarement, quelques poissons se montrent, mais ils ont tendance à fuir dès la moindre onde quelques mètres alentour. Souvent, j’aperçois des étoiles de mer entièrement noires, aux bras très fins ; elles semblent particulièrement fragiles. A la pointe, le banc de sable s’est totalement découvert. On pourrait presque rejoindre l’île de Macaloa à pied. Le chenal qui reste est assez étroit. Finalement, je rejoins le camp par la mer après cette boucle les pieds dans l’eau.

 

Dans l’après-midi les autres ont choisi d’aller sur l’île de Macaloa en dhow. N’ayant pas vraiment le pied marin, j’ai préféré passer mon tour, surtout que la surface a l’air de bien bouger et le vent est contraire. Du coup, cal m’offre un bon moment de fou rire lors de l’embarquement de la troupe devant le camp. Et que dire du cap pris : l’île paraît toute proche mais ils cinglent à 90° plus à l’ouest et ils s’éloignent, s’éloignent !!! Il leur faudra ainsi près d’une et demie pour atteindre cette île distante d’à peine trente minutes (les aléas des vents). Tout ça en vain car un garde leur interdira de débarquer au prétexte que c’est une propriété privée.

 

De mon côté, j’attends 15h30 pour aller marcher sur la plage nord de Pangane. L’activité y est assez limitée à cette heure. Par contre, j’arrive à approcher d’assez près un groupe d’aigrettes bleues. Elles sont en tout une quinzaine sur la longueur de la plage. Il faut faire attention aux amarres des dhows qui montent et descendent au fil du flux et du reflux. Gare à ne pas trébucher ! Au bout d’un moment, je me décide à obliquer vers la terre mais j’ai l’impression d’avoir trop dépassé le village. Les cases sont lointaines. Je me retrouve près d’un cimetière très sommaire. Tout à côté émerge de la végétation un bout de ruine à colonnades avec des ouvertures qui pourraient laisser éventuellement penser à une ancienne chapelle. Un peu désorienté, je retourne sur la plage pour revenir sur mes pas. En chemin, j’aperçois trois petits garçons s’amusant follement avec un semblant de cerf-volant. Plus loin, des jeunes gens plus âgés taquinent le ballon de foot de manière assez adroite sur l’incontournable terrain du village. En fond, les femmes sont encore de corvée d’au à la pompe. Les couleurs avec cette lumière déclinante sont encore une fois superbes. Je retrouve ce même éclairage après avoir rejoint l’autre rive du village. Une dernière fois, j’immortalise la presque île. Le fameux axe permettant d’apercevoir la presque île et la mer des deux côtés se révèle enfin ! Dans l’eau, quatre jeunes s’éclatent dans un dhow amarré avant de patauger dans une pirogue à la limite de couler ! Les remontrances sont sérieuses lorsqu’un adulte s’en rend compte. Ailleurs, ce sont trois petites filles qui s’amusent avec peu : elles aimeraient être prises en photo. Derrière, deux autres garçons s’amusent avec leur vélo. En fait, il suffit de s’asseoir dans un coin et de regarder la vie s’écoulait autour de soi.

 

C’est en retournant au camp que j’aperçois le dhow rentrant au bercail : fin d’une après-midi de navigation apparemment mouvementée. Pas de regrets d’avoir évité cela ! De retour au camp, nous constatons l’arrivée d’un couple de routards italiens. Arrive l’heure du dernier repas au bord de l’océan indien. Comme commandé, chacun reçoit ce qu’il désirait. Certains se délectent d’un kingclip grillé tandis que nous sommes trois à poursuivre sur la langouste accompagnée cette fois de pommes de terre bouillies et frites, et toujours du riz. Toujours aussi bonne même deux jours d’affilée. Pendant le café, je lève encore une fois les yeux au ciel pour admirer cette voûte céleste. Les étoiles sont innombrables, la Voie Lactée est en partie visible et pour couronner le tout, des étoiles filantes passent chaque soir. Voici qui fait un des charmes de l’Afrique Australe.

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P
l'aventure !
Répondre
J
Exactement, je préfère de loin ces voyages, à l'aventure