A la découverte des trésors du Levant (6)

Publié le par Jérôme Voyageur

Jerash, la place ovale
Jerash, la place ovale

Nous repartons donc vers Deraa, ville frontalière. Il ne semble pas évident de trouver le poste frontière en l’absence de panneaux. Les formalités commencent. Nous évitons d’abord la fouille du véhicule côté syrien. Arrivés à l’immigration, nous apprenons que la taxe de sortie doit être acquittée au comptoir de la fouille. Du coup, Carrol repart en courant les chercher pour nous. Surprise à son retour, ce n’est pas 550 mais 500 livres syriennes dont il fallait s’acquitter. Nous pouvons confier nos passeports aux agents qui les gardent un très long moment. Direction la sortie pour un dernier contrôle très tatillon alors que devant nous une voiture pleine à craquer est passée visiblement avec un bakchich. Le bout de route jusqu’au poste jordanien est plutôt glauque entre deux grillages où se sont accumulés les ordures.

Et nous recommençons le même manège sauf qu’en plus, il faut débarquer tout les bagages pour les passer au scanner. Notre nouveau guide, Adnan, arrive sur ses entrefaites. A l’immigration, nous apprenons que nous devons finalement nous acquitter d’un visa étant donné que nos vols de retour sont différents, donc nous ne constituons pas un groupe suffisant aux yeux de la loi jordanienne. Heureusement qu’un bureau de change est accolé au poste. Après toutes ces péripéties, nous pouvons dire au revoir à Carrol qui fut plus qu’un chauffeur, et sans qui nous n’aurions pas fait autant d’extras.

C’est parti pour la Jordanie après un ultime contrôle des passeports à la sortie du poste frontière. Jamais je n’avais vu un contrôle aussi strict. Est-ce une impression ou la réalité, toujours est-il que nous avons plus chaud depuis la frontière. Il nous faut une petite heure pour rejoindre Jerash, le temps pour nous de constater une circulation plus respectueuse. Il faut dire que les policiers sont partout et actifs.

Arrivés à Jerash, nous ne faisons qu’apercevoir les vestiges. Vu l’heure, nous commençons par aller manger. Nous retrouvons d’ailleurs des plats très semblables. En plein cagnard, nous rejoignons ensuite le site. Vu le nombre de bus sur le parking, nous ne serons pas seuls pour visiter cette antique cité romaine.

Nous passons d’abord sous un arc monumental érigé pour accueillir l’empereur Hadrien, ce qui lui a valu son nom. Juste derrière, ce que je croyais être une construction moderne se révèle être un ancien hippodrome restauré. Nous suivons l’esplanade jusqu’à la porte sud, un autre arc monumental qui marque réellement l’entrée du site. Après un rapide passage sur cette très particulière place ovale bordée de colonnades, nous grimpons à travers le cryptoportique jusqu’au temple de Zeus. Tout à côté se trouve le théâtre sud. Il est certes moins imposant que celui de Bosra mais il est très bien conservé. Son angle est un parfait panorama pour embrasser la ville et distinguer parfaitement la forme de la place. Au pied de la scène, trois jordaniens en tenue locale avec le keffieh rouge jouent régulièrement un air écossais, en particulier avec une cornemuse. La surprise est totale.

En montant vers les trois églises, nous admirons de belles colonnades qui s’étirent tout le long de l’ancien cardo. Jerash n’a rien à envier à Palmyre. Elle est pourtant bien moins connue. Ces trois églises. Saint Georges, Saint Jean-Baptiste et Saints Côme et Damien, sont en fait accolées, un moyen de contourner les interdictions de rassemblement de l’époque. Le sol de la dernière est recouvert de belles mosaïques colorées. Il est possible de les admirer depuis la terrasse aménagée en surplomb de l’édifice. Direction ensuite le temple d’Artémis, protectrice de la ville. Il dispose d’énormes colonnes. Il nous faut être trois les bras tendus pour en faire le tour. Non loin de là nous attend un second théâtre, plus petit que le précédent (et le troisième de journée, de plus en plus petit !!). Juste en dessous se déploie la colonnade nord jusqu’à un nouvel arc qui fait office de porte. Nous remarquons aussi la présence d’un magnifique tétrapyle qui coiffe ce carrefour nord.

Désormais, nous déambulons sur le cardo maximus entres les nombreuses colonnes. Une nouvelle halte s’impose devant le Nymphée, qu’on imagine avoir été une très belle fontaine aux proportions imposantes, s’élevant sur deux niveaux. Dernières photos sur la place ovale baignée par une superbe lumière couchante. Fin de la visite, baignée dans une épaisse poussière provenant de l’hippodrome. On aurait dit un tournage de film.

Il faut reprendre le véhicule pendant une demi-heure pour rejoindre la petite cité d’Ajloun, perchée dans les collines entre pins d’Alep et oliviers.

Mardi 19 octobre 2010, Ajloun

La nuit fut très calme sur les hauteurs de la petite ville d’Ajloun, encerclés par les oliviers. Nous repartons avec un autre chauffeur, cousin du précédent. Les premiers kilomètres sont toujours aussi montagneux. Nous apercevons principalement des oliviers et quelques grenadiers. Tout d’un coup, le panorama s’élargit : des serres à perte de vue devant nous. C’est la vallée du Jourdain qui se présente. Un véritable jardin pour la Jordanie principalement cultivé par les palestiniens. D’ailleurs les hauteurs au loin sont en Cisjordanie. Dans les rues, nous avons la surprise d’apercevoir des gens à la peau sombre. Ils sont tout simplement les descendants des esclaves africains des Mamelouks. Le lit du Jourdain ainsi que le canal du roi Abdallah se dérobe à nos yeux.

Subitement, au passage d’un feu vert, le véhicule cale et ne daigne redémarrer. Rapidement, le guide réagit en attrapant deux taxis dans lesquels nous transférons toutes nos affaires. Après un peu plus de dix kilomètres, nous débouchons près d’une étendue d’eau. C’est la pointe nord de la Mer Morte. Nous descendons à la plage d’Amman, un complexe privé en bord de mer. La chaleur est déjà pesante, autour de 32° C. Il est même difficile de voir la rive opposée pourtant peu éloignée. Après un passage par les vestiaires, j’oublie provisoirement les deux piscines pour aller directement sur la plage, bien équipée en chaises, abris et douches ainsi qu’un maître-nageur. Les rives font l’objet de cristallisation. Il faut dire que la teneur en sel de la Mer Morte est de 30%. La température est parfaite ce qui permet d’y rentrer d’un trait. Enfin d’essayer car il est difficile de pouvoir descendre (il est de toute façon fortement déconseillé de plonger ou d’en avaler). Dès que le corps se relâche, il est inévitablement remonté à l’horizontale. La sensation est surprenante et inhabituelle. J’ai beau essayer tout un tas de positions plus ou moins improbables, je suis toujours porté. Il est même mal aisé de se remettre debout même là où on a pied. Par contre, la sensation sur la peau est très spéciale avec tout ce sel. Du coup, je préfère y aller plusieurs fois en entrecoupant avec des douches à l’eau douce. Après cette nouvelle expérience, je ressens le besoin de nager ce qui n’est pas possible dans la mer. Direction donc la piscine bien plus fraîche mais tout aussi agréable. A midi, nous prenons notre repas sur place. Ces deux heures de détente ont laissé le temps à Adnan d’obtenir un autre minibus pour poursuivre notre circuit.

Nous suivons la route de la corniche, à flanc de falaise. Nous coupons ainsi plusieurs canyons qui s’enfoncent dans le massif rocheux bien sec. Pas un de ces oueds ne coule. La Mer Morte s’assèche. Nous le constatons plus loin. Une vingtaine de mètres si nous en croyons les marques sur les berges abruptes. Des stalactites sont même visibles. A cet endroit, l’eau prend des teintes vertes, sûrement les effets du sel. Quant à nous, c’est l’assaut par les mouches. Il est temps de remonter dans le véhicule où malheureusement elles nous poursuivent. Nous ne tardons pas à virer à gauche pour monter vers les hauteurs via une route sinueuse. La pente est raide. En peu de temps, nous passons de -400mètres d’altitude à plus de 900 mètres. Nous parvenons finalement à Kerak. Quelle surprise de voir tous ces bus s’entasser juste devant le château alors qu’il n’y a que très peu de place.

Même à pied il faut rentrer le ventre pour passer entre deux véhicules. Après le Krak, le château croisé de Kerak, ancienne possession de Renaud de Châtillon, fait tout de même pâle figure, tant par sa dimension que son état. Le sentiment est tout autre en repartant lorsque nous circulons au pied du glacis bâti sous le donjon. Le premier contact est néanmoins un simple mur de pierres qu’on approche via une passerelle. A la sortie, nous en profitons pour faire enfin du change. Cela devenait indispensable pour certains. Et puis nous ne cessons de boire : cela en devient impressionnant. Pour rejoindre Wadi Musa, nous laissons la route des Rois pour rejoindre la route du désert plus à l’est. Puis c’est direction plein sud. Le soleil se couche avant que nous arrivions à destination. Ce soir, ce sera un trois étoiles : quel contraste avec celui d’hier !

Jerash et KerakJerash et KerakJerash et Kerak
Jerash et KerakJerash et Kerak
Jerash et KerakJerash et KerakJerash et Kerak

Jerash et Kerak

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