Immersion zimbabwéenne (5)

Publié le par Jérôme Voyageur

La tour symbole du Great Zimbabwe
La tour symbole du Great Zimbabwe

Après cette dernière halte dédiée à la culture, place aux conducteurs. Un peu plus de trois cents kilomètres sont nécessaires pour relier le parc national de Matopos au site de Great Zimbabwe, près de la ville de Masvingo. Je n’en vois qu’une partie étant donné les nombreuses micro-siestes. A l’entrée de la ville, j’ai la surprise d’apercevoir quatre zèbres au bord de la grande route. Fred l’est tout autant que moi. Surtout qu’il n’y pas de zone sauvage dans cette partie du pays. Finalement, vers quinze heures trente, nous installons le camp dans l’enceinte de Great Zimbabwe, monument national de premier ordre. Bien évidemment, nous laissons de côté les hébergements en dur pour occuper la zone de camping largement disponible. Nous avons tout notre temps pour nous mettre à l’aise. D’ailleurs, dès vingt heures trente, tout le monde est couché et commence à dormir profondément.

Vendredi 24 Octobre 2014, Great Zimbabwe

La nuit fut musicale bien plus longtemps qu’annoncé. Les étudiants fêtant la fin de leurs études sur le site n’ont pas été bien sérieux. Heureusement il n’a pas fait trop frais. Bien que nous soyons sur place, nous ne changeons pas nos horaires. Le petit-déjeuner débute à cinq heures. Trente minutes plus tard, nous commençons à nous diriger vers le site qui n’ouvre en théorie qu’à six heures. Comme cela, nous sommes certains d’avoir le site que pour nous, pour un temps au moins ! Nous nous dirigeons directement vers la citadelle au sommet de la colline. Et pour l’atteindre nous choisissons le chemin dit « ancien » plus authentique mais aussi plus escarpé. En chemin nous passons devant le bâtiment faisant office de boutique et de restaurant. Sa terrasse héberge un nombre impressionnant de vervets. Deux magnifiques arbres fleuris apportent leur ombre, jacaranda d’un côté, acacia de l’autre. En attendant l’ascension commence. Une fois n’est pas coutume, Inno nous accompagne : j’y vois un signe de l’importance du site pour tous les zimbabwéens. Bien sûr le chemin comporte surtout des marches mais de taille bien étrange. Quelques passages se font à l’étroit entre deux énormes rochers. En progressant tranquillement et en profitant des points de vue sur le reste du site, il faut moins de trente minutes pour couvrir les trois cent quatre vingt mètres de ce parcours. L’arrivée se fait au pied d’une imposante muraille faite de pierres sèches dans laquelle est percée une porte étroite et basse, j’ai bien dit basse …Gare aux têtes ! Nous débouchons dans une cour de fort médiéval qui pourrait rappeler celles de certains de nos châteaux cathares. Les murs de pierre sèche s’adaptent, suivent ou comblent les énormes rochers qui parsèment le sommet. Parfois, néanmoins, il vaut mieux éviter de s’appuyer sous peine de faire écrouler une portion. Seule le mur d’entrée est surmonté de petites tours coniques. Difficile néanmoins d’imaginer l’usage de chaque pièce sur la seule base des ces restes de murs. Le site peut rapidement se révéler un labyrinthe : il y a des passages un peu partout. Ceci a pour conséquence que chacun a une visite différente au gré de ses choix à chaque corridor. D’en bas, je ne soupçonnais pas un telle complexité architecturale, la ballade n’en est que plus étonnante. Quelques rares damans peuvent être aperçus sur les plus gros rochers qui commencent à recevoir les premiers rayons du soleil. De là haut, nous découvrons l’ampleur de la cité. Au pied de la colline rocheuse se déploient diverses enceintes de pierres sèches, la plupart détruites au point de ne présenter qu’un mètre de hauteur, tandis que la plus connue et la plus imposante domine les alentours, baptisée tout simplement le Grand Enclos (Great Enclosure en anglais). Elle se dresse en bordure du complexe médiéval. En fait, la citadelle est la plus visible grâce à sa position haute mais ne représente qu’une petite partie du Great Zimbabwe.

Pour redescendre, nous optons pour le chemin moderne, plus long d’une centaine de mètres mais plus facile à emprunter, plus lisse et plus large. Nous repassons tout prêt de l’énorme et magnifique jacaranda qui surplombe la petite boutique. Ce n’est pas ici que nous allons nous ruiner ; il n’y a pas grand choix. De là, nous nous dirigeons vers les divers « enclos » qui parsèment la plaine. Avec le soleil qui commence à bien illuminer, nous découvrons un sympathique cadre où se mêlent petits murets, étroites allées parfois pavées et végétation abondante souvent composée de plantes grasses grimpantes. Nous constatons aussi que l’essentiel des structures sont toutes en rondeurs, l’angle droit et la ligne droite semblent avoir été proscrits. Au fur et à mesure de notre progression, nous voyons ce grand mur d’enceinte du « grand enclos » grandir à vue d’œil. Il faut dire qu’il en impose avec une hauteur maximale flirtant avec la dizaine de mètres, le tout couronné d’une frise constituée de pierres posées à l’oblique. En y pénétrant, nous découvrons qu’en plus d’être haute la muraille est particulièrement épaisse. De l’extérieur, la surface est bombée, si bien qu’au pied du mur, nous ne voyons pas le sommet ! Une seconde enceinte plus modeste double la muraille extérieure. Ici aussi tout est en courbes. Le summum étant la tour qui fait la fierté du pays (à tel point qu’on la voit partout y compris dans l’architecture de la tour de contrôle de l’aéroport international d’Harare qui en a copié l’apparence). C’est un véritable symbole national tout comme l’est l’aigle de pierre qui a été retrouvé sur place et qui a pris place sur le drapeau national.

Après avoir longuement profité de cette bien belle enceinte, nous nous orientons vers le village reconstitué. A cette heure encore matinale, il n’y a personne. Les cases reconstituées n’apportent pas grand-chose, et manquent d’entretien ; pour la plupart, elles servent d’entrepôts au x vendeurs de souvenirs. En revanche, nous découvrons que tous les objets des vendeurs sont là au sol, sans surveillance. Etonnant. Un homme finit par arriver, et voyant l’intérêt de Fred pour un objet, prend son téléphone pour contacter le vendeur officiel et jouer l’intermédiaire jusqu’ conclure l’affaire. Etonnant ! Néanmoins, nous ne nous éternisons pas et repartons vers le musée en longeant le bois au pied de la citadelle. Celui-ci retrace parfaitement l’histoire du site au fil des âges, s’attardant sur divers détails de sa construction et de sa culture. Quelques artefacts sont exposés dans les vitrines. La seconde pièce, sécurisée, comporte huit effigies de l’oiseau symbole du pays. Un détour par la boutique bien clairsemée et nous retournons à notre camp. Avant dix heures nous avons déjà fini notre exploration. Les nattes et matelas trouvent rapidement preneurs pour se reposer à l’ombre entre la collation et le repas du midi. Programme à peu près identique pour l’après-midi. Nous sommes vraiment à fond en cette fin d’expédition. Vers quinze heures trente, nous prenons les véhicules pour aller voir le petit marché artisanal situé à deux kilomètres environ du site. C’est l’effervescence avec notre arrivée. Chacun ou presque repart avec quelque chose.

En revanche, notre motivation est bien moindre au retour. Le ciel s’est soudainement couvert. Plus de belle lumière sur le site qui permettrait de belles photos. Pire, l’orage se met à gronder et à éclater. Nous scrutons le ciel et le mouvement des gros nuages noirs. Par sécurité, nous ajoutons provisoirement les doubles toits à nos tentes. Après trois gouttes, le soleil semble revenir. Nous en profitons pour retourner sur le site, aux alentours du musée. D’ici nous avons un joli point de vue sur la citadelle et nous découvrons même un enclos zappé ce matin. Deux immenses arcs en ciel surplombent momentanément Great Zimbabwe. Finalement, l’orage est passé sans trop de complications pour nous si ce n’est que l’électricité à sauter, mais cela ne nous dérange pas, au contraire même. Des gens du site envisagent de démarrer le groupe électrogène installé à quelques mètres de nos tentes. Lorsqu’ils repartent après l’avoir préparé sans le démarrer, est lancée l’opération anti-groupe. Il s’agit de piéger le cadenas pour qu’il ne soit plus utilisable. Pour cela, Fred se charge de faire diversion en allant discuter avec les deux gardes assis à l’autre bout du pré. Pendant ce temps, Isabelle s’occupe de remplir le cadenas de chewing-gum.

Ce soir, dernier repas en bivouac, c’est fête : vin blanc frais à l’apéritif, spécialité zimbabwéenne en plat principal, histoire de caler les estomacs et enfin, un dessert expérimental mais délicieux à base de banane, de sucre, de crème, de Nutella et un trait d’Amarula. Tout le monde en reprend par gourmandise.

Samedi 25 Octobre, Great Zimbabwe

Grasse matinée ce matin à tel point que tout le monde émerge « plus tard » que d’habitude. Evidemment, nous sommes levés et prêts avant cinq heures trente, heure du petit-déjeuner. Après les craintes de pluie, la nuit fut finalement bien douce. La tentative de sabotage a lamentablement échoué. Après que la lumière est revenue en début de soirée, j’entends quelqu’un bricoler sur le groupe électrogène mais sans le démarrer. En fait, il est venu le bâcher en attendant la prochaine « alerte ». Nous prenons notre temps pour plier une dernière fois les tentes. Avec le vent, cela devient vite comique, puis pénible. Pas de candidat pour retourner faire quelques derniers clichés, la faute à un plafond nuageux qui s’est installé en fin de nuit.

Du coup, nous partons un peu avant sept heures en direction du nord pour rejoindre Harare. La ville de Masvingo est méconnaissable si tôt. Pas âme qui vive dans les rues, là où il y avait tant d’effervescence quand nous sommes passés l’autre jour. Comme souvent, je comate mais principalement la première demi-heure. Nous faisons une halte au premier marché artisanal que nous apercevons le long de la route. Nous y découvrons de jolies pièces en pierre mais bien trop volumineuses pour moi. Je passe mon tour. La suite se révèle particulièrement pénible pour les deux conducteurs. De nombreux camions utilisent cet axe sud-nord reliant le Zimbabwe et l’Afrique du Sud. L’aide des copilotes pour dépasser en sécurité n’est pas de trop. Néanmoins, nous progressons très bien, à tel point que le pique-nique en route se transforme en repas au restaurant, non loin de l’hôtel. Pour ceux qui se plaignent des portions servies par Fred, ils sont surpris. Les assiettes sont largement copieuses et bien bonnes à déguster. Après le café, nous faisons un rapide passage dans le supermarché préféré de Fred : les meilleurs produits frais de la ville rassemblés en un même endroit. Après trois semaines de dégustation, nous ne pouvons que confirmer la qualité de leurs produits. Quelques minutes plus tard, nous sommes de retour au Cresta Lodge. Après une bonne douche relaxante, je m’attaque aux sacs pour les refaire proprement. Et ensuite, repos devant la télévision délicieusement vautré au milieu des nombreux coussins. La sieste n’est jamais loin !

Nous nous retrouvons sur la terrasse vers dix huit heures pour prendre un dernier verre et partager nos impressions les plus marquantes. Une fois n’est pas coutume, certaines scènes font quasiment l’unanimité comme l’après-midi éléphantesque. Nous poursuivons à la terrasse du restaurant pour un dernier repas ensembles, Inno excepté puisqu’il est parti rejoindre sa famille.

Dimanche 26 Octobre, Harare

En cette journée de dimanche, le restaurant de l’hôtel n’ouvre qu’à sept heures. Cela représente une sacrée grasse matinée pour nous. Je larve sans peine dans ce moelleux lit jusque vers sept heures trente. Au petit-déjeuner, je ne retrouve que Fred, Dom et Catherine. Les autres dorment encore. Programme copieux étant donné la longue journée qui nous attend. D’abord du classique sucré puis une bonne assiette chaude et salée.

Vers dix heures, nous nous rassemblons devant l’entrée pour le départ. Nous quittons Fred mais aussi Dom et Catherine qui ne rentrent que demain. Une fois n’est pas coutume, il me vient presque une petite larme. Signe que le séjour a été réussi. C’est la navette de l’hôtel qui nous conduit jusqu’à l’aéroport international. En cette matinée dominicale il n’y a pas grande circulation. Du coup, nous ne mettons qu’une vingtaine de minutes pour y parvenir. Le vol n’ouvrant que deux heures trente avant le décollage, nous passons un bon moment à attendre dans le hall de l’aérogare un peu surchauffé. Les boutiques ouvertes sont rares ! Le tour est donc vite fait. Impossible de convaincre l’agent de nous laisser faire la queue devant le guichet d’enregistrement. Il faut attendre l’heure… A midi pile, il nous laisse enfin passer et nous pouvons nous enregistrer et passer les contrôles à une vitesse étonnante. La salle d’embarquement comporte assez peu de boutiques mais j’arrive tout de même à dénicher quelques bricoles. Une petite faim venant, j’en profite même pour casser la croûte en attendant que notre avion atterrisse. Celui-ci arrive presqu’à l’heure de l’embarquement. Nous aurons un peu de retard. Comme à l’aller, l’avion n’est rempli qu’à moitié.

Arrivés à Johannesburg, nous devons patienter un bon moment au contrôle du transit du fait de l’arrivée simultanée de plusieurs vols. Je ne comprends toujours pas l’intérêt de ce contrôle d’immigration mais il est incontournable. Nous pouvons enfin récupérer notre dernière carte d’embarquement et écumer les boutiques du duty-free.

Nous décollons à l’heure prévue. Le vol est régulièrement secoué par des turbulences. Cela ne change pas grand-chose sur mon sommeil. Je visionne deux films avant de comater pendant trois ou quatre heures. A l’approche de Paris, nous découvrons que le brouillard annoncé est une vraie purée de pois. La piste n’est quasiment pas visible. Minutes de stupeur lorsque le pilote remet les gaz (cela fait deux fois sur ce voyage) sans le moindre commentaire. L’équipage restant calme, je suppose que ce ne doit pas être grave, mais le commandant de bord finit par nous expliquer qu’un avion saoudien était encore sur la piste. Nous avons frôlé le fait divers. La suite se passe sans encombre : le contrôle d’immigration est quasiment désert et les bagages livrés rapidement. Par contre, j’ai du mal avec le retour à la civilisation. Le trajet en RER et la marche finale dans la brume sont plus pesantes que d’habitude. Qu’il faisait bon au Zimbabwe ….

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article