Ronde bolivienne (4)

Publié le par Jérôme Voyageur

Mardi 25 mai 2010, La Paz

 

Vers 5 heures, nous arrivons à la gare routière de la capitale. C’est l’effervescence malgré l’heure bien matinale. Nous montons dans un minibus à destination de notre hôtel dans les rues qui s’éveillent à peine. Il nous tarde une seule chose : rejoindre nos lits pour dormir un peu plus car le bus, même en semi couchette avec couverture, n’a rien d’idéal pour cela. Nous réémergeons vers 9 heures pour prendre le petit-déjeuner et une douche bien attendue.

Nous pouvons partir à la découverte du centre ancien de la capitale bolivienne. A commencer par la Calle Linares voisine de l’hôtel, plus connue sous le nom de rue des Sorcières.  En effet, un certain nombre de commerçantes proposent une série de remèdes miracles et talismans en tous genres. Cette rue est aussi connue pour la vente de fœtus de lamas qu’on aperçoit sur les étals. Le quartier est aussi un paradis pour touristes : toutes sortes de produits typiques y sont proposés. Et du fait de la présence de trois « chicas » avec nous, il nous faut presque deux heures pour atteindre l’église San Francisco située seulement à trois cents mètres, en bas de la rue Sagarnaga. Celle-ci date du 16ème siècle ; sa longue façade de pierre sculptée domine la place voisine. A l’intérieur, nous découvrons un chœur et des chapelles au style très chargé. Les anciens bâtiments conventuels abritent un musée dont on peut admirer une partie de l’architecture en rentrant par le café au bout de la place. Nous continuons ensuite la ronde des boutiques jusqu’à dénicher un restaurant pour le repas du midi.

Le ventre plein, nous essayons de dénicher le marché central, à quelques blocs au-dessus de notre hôtel. En fait, seuls les bouchers semblent y être installés. Pour l’essentiel, les étals sont répartis tout autour, voir même dans les rues avoisinantes : on y trouve de tout. Au hasard de nos pérégrinations, nous finissons par dénicher le marché aux fruits et légumes, authentique et coloré. Il est alors temps de retourner vers le centre. Notre nouveau but est la plaza Murillo. Elle constitue la place centrale de la ville. Outre la massive et austère cathédrale du 19ème siècle, nous y voyons le palais présidentiel avec sa garde et le parlement. Quant à la place, elle est recouverte de pigeons. Avec Evelyne, nous abandonnons le reste du groupe au musée national d’Art pour descendre plus au sud via la grande avenue centrale jusqu’au musée d’art contemporain. J’abandonne à mon tour Evelyne pour rejoindre le musée archéologique non loin de là. Manque de chance celui-ci est fermé jusqu’à nouvel ordre. La partie culturelle s’est muée en séance de lecture. C’est ainsi que se passe la fin de journée avec de nouvelles boutiques jusqu’à rejoindre l’hôtel vers 17h. Nous le quittons à nouveau en groupe plus important pour aller au restaurant Angelo Colonial lui aussi dans la Calle Linares. Ce soir, c’est Byzance : apéro et vins sont servis promptement.

 

Mercredi 26 mai, La Paz

 

Ce matin, nous quittons la capitale pour la région des Yungas. Enfin, nous essayons ! Un véhicule bien mal garé dans la Calle Linares voisine nous empêche de partir. Les policiers ne semblent  pas pouvoir y faire grand-chose. Après 45 minutes, nous finissons par remonter la Calle Sagarnaga à contre sens, protégés par deux autres policiers qui ont fermé son accès. Nous pouvons enfin bouger dans les embouteillages de La Paz. La circulation et le nombre de gens dans les rues est impressionnant : cela grouille littéralement. Et que dire de la façon de conduire des pacéniens : il faut avoir le cœur bien accroché pour se lancer avec son propre véhicule dans une telle mêlée. Cette sortie de la ville nous permet d’appréhender toute son étendue et son relief très escarpé et si particulier. Il faut un bon moment pour s’en extraire et rejoindre les hauteurs de la cité du côté de la Cumbre.

Après avoir longé quelques lacs, nous atteignons le col où s’élève un Christ qui sert aussi d’autel pour la Pachamama. Nous sommes en plein syncrétisme. Notre guide  local fait d’ailleurs une offrande d’alcool pour garantir notre descente tandis que Marie-Noëlle lui offre un caramel. Néanmoins, les éléments restent hostiles : vent froid et brume épaisse nous enserrent. Nous entamons alors celle qui est qualifiée comme « la route la plus dangereuse du monde », même si depuis quelques années, elle a été doublée par une seconde route bitumée. Mais rapidement, il faut passer le contrôle anti-narcotique. Il faut dire que nous entrons dans une région de production de la feuille de coca. Les premiers lacets sont vertigineux. La vallée est bien encaissée et totalement bouchée par la brume et les nuages qui nous couvrent d’une fine pluie. En contrebas apparaît l’ancien tracé.

Après quelques kilomètres, nous bifurquons enfin sur l’ancienne piste. Place aux graviers. Nous avons déjà noté le changement d’environnement : la végétation est très présente et bien verte. Au plus nous avançons, au plus elle devient luxuriante. Nous sommes souvent plongés dans la brume. La piste est aussi très étroite. Heureusement qu’elle est à sens unique. Elle suffit à peine pour laisser passer un véhicule un peu gros comme notre bus. Le précipice est souvent vertigineux, souvent plusieurs centaines de mètres d’à-pic. D’ailleurs, tout du long, ce sont plusieurs dizaines de croix qui marquent autant de victimes. De fines cascades dévalent des parois abruptes, atterrissant parfois directement au milieu de la piste. Autour de nous, les fougères arborescentes rivalisent pour être les plus grandes. Les lichens forment une dense chevelure sur les branches des arbres. Ici et là, des épiphytes se sont installées.

Après plusieurs kilomètres à bord du véhicule, nous faisons un bout de descente à pied. C’est l’occasion de mieux se rendre compte de ce cadre naturel. Nous sommes dépassés par un groupe de vététistes ; car c’est désormais l’usage principal de l’ancienne piste. Nombreuses sont les agences à proposer cette activité aventureuse. C’est ainsi que nous rejoignons Coroico dans la région des Yungas. Ce village est perché sur une crête au milieu d’une dense végétation : bananiers, agrumes, multiples fleurs et arbres inconnus. Nous pouvons aussi entendre de nombreux oiseaux. Malheureusement, Coroico est aussi connu pour la brume qui bouche régulièrement la vallée.

Finalement, vers 14h, nous atteignons enfin notre hôtel, le Don Quijote, à la sortie de la ville. Nous sommes les seuls résidents. Un buffet nous y attend : on dirait que nous n’avons pas mangé depuis au moins trois jours. Ceci fait, le lit me tend les bras pour une courte sieste tandis que les autres partent explorer la cité. A mon réveil, je tente bien de les rejoindre mais la pluie a vite fait de me faire rebrousser chemin. Ce sera finalement un après-midi lecture et cartes postales.

Ce soir, nous renouvelons l’expérience pisco avec toujours autant de réussite, quoi que celui-ci  soit un peu plus fort que les précédents. C’est d’ailleurs les prémices d’une soirée très animée : nous finissons par prendre les commandes de la chaîne hi fi. Robert refait son show et nous ouvrons le Sauterne des sœurs clarisses de Coroico, qui se révèle être un genre de muscat. Une excellente ambiance pour une soirée bien tardive ; nous rejoignons nos lits après 22h !! C’était sans compter l’arrivée tardive de deux gars de l’administration accompagnés probablement de deux prostituées qui allaient faire du raffut pendant près de trois heures sans que rien n’y fasse, sauf les bouchons d’oreilles.

 

Jeudi 27 mai, Coroico

 

Avant d’enlever les bouchons, la journée semblait bien commencer après une nuit qui avait bien fini, dans le calme. Sauf qu’en fait, il pleut des cordes, avec une brume épaisse et basse. Il est désormais impossible d’apercevoir les collines en face et en contrebas. Le projet de randonnée jusqu’aux cascades tombe à l’eau (c’est le cas de le dire !!!). Au bout d’un moment, nous nous retrouvons tous alignés le long des chambres, assis sur les divers bancs et fauteuils, qui avec un livre, qui avec des cartes à écrire. Il y aussi deux chambres à dévaliser puisque les clés sont restées à l’intérieur ! Cela a le mérite de mettre de l’animation, de même que le récit des évènements de la nuit par les différents protagonistes.

Vers 10h30, la pluie semble enfin avoir cessé. Il ne reste plus que la brume, qui de toute façon peut changer très rapidement. Nous partons donc marcher à l’opposé du village sur une piste mouillée mais pas trop grasse. Même si le paysage est bouché, nous arrivons à voir pas mal de végétation dont quelques caféiers et bananiers, de même que nombre d’oiseaux : un colibri, des perroquets, des perdrix, et même un petit oiseau bleu et blanc bien patient. Faute d’avoir vu les cascades, nous aurons au moins promené au grand air pendant plus d’une heure.

Vers midi nous rejoignons le centre-ville pour déjeuner. Le repas est bon mais que le service tire en longueur, sans compter les plats inscrits à la carte mais indisponibles. Ils ne doivent pas être habitués à avoir du monde ! A 14h passées, il est temps de repartir vers la capitale. D’abord, une longue descente jusque vers 1000 mètres d’altitude avant d’entamer une ascension de près de 3500 mètres de dénivelé, le tout dans une brume très épaisse ; chapeau le chauffeur, surtout que la nouvelle route est parfois bien défoncée. Il faut trois bonnes heures pour rebasculer le col de  la Cumbre et atteindre les hauts faubourgs de La Paz. Nous y retrouvons la foule et cette circulation totalement anarchique. C’est affolant à voir : je suis même rassuré de n’être que spectateur !

Arrivés à l’hôtel, il ne nous reste qu’une grosse heure et demie pour faire de nouvelles boutiques avant de retrouver notre restaurant d’il y a deux jours. Toujours aussi bon mais cette fois occupé par des américains bien trop bruyants pour certains.

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