Traversée sud-africaine (4)

Publié le par Jérôme Voyageur

Mercredi 4 novembre 2009, Port Saint Johns

 

 

Réveil avec le beau temps. Départ aux aurores. Nous repartons vers le sud-ouest. Mais d’abord, il faut reprendre la route « de montagne » jusqu’à Umtata. Nous retrouvons ce paysage vallonné et verdoyant du Transkei, parsemé de nombreuses habitations dont des rondavels, sans pour autant constituer des villages. La terre semble bien peu fertile avec tous ces cailloux. Nous apercevons principalement des troupeaux de bétail. Le plafond est toujours aussi bas dès que nous quittons la côte. Quelques kilomètres plus loin, nous traversons Qunu, le village natal de Nelson Mandela ; un musée lui est d’ailleurs consacré dans le grand centre administratif qu’est Umtata.

 

East London marque de grands changements. Nous passons sous un climat méditerranéen. Le soleil s’installe enfin, bien soutenu par un vent continu qui souffle de l’océan et repousse les nuages à l’intérieur des terres. De ce fait, le pique-nique tourne à la franche rigolade. Il faut tout arrimer jusqu’au moindre grain de riz ! La végétation change radicalement. Elle fait penser à notre garrigue. C’est aussi le début du « fynbos », cette végétation spécifique qui s’étend jusqu’au Cap et renferme plus de mille espèces végétales. De temps en temps, nous apercevons quelques cactus. Sur le bord de la route, les vendeuses de pêches ont remplacé celles d’ananas.

 

Grahamstown, étape de ravitaillement, nous offre un visage « so british ». Nous y trouvons musées et universités ainsi que de nombreuses églises. C’est la ville qui en compte le plus dans le pays, al principale étant la cathédrale Saint Michel et Saint Georges, de style gothique, en plein centre ville.

 

Notre trajet nous conduit à quitter la nationale bitumée pour une route secondaire qui se révèle être une piste de graviers. Elle est bien pratique pour rejoindre Patterson puis ensuite l’entrée du parc national d’Addo Elephant. Heureusement qu’elle n’est pas trop longue. Juste assez pour donner ces sensations africaines ! Avant d’arriver, nous apercevons déjà divers animaux. Des réserves privées se sont implantées aux abords du parc national. Le temps d’expédier les formalités administratives et de décrocher la remorque, et nous filons dans l’enceinte du parc. Il ne nous reste qu’une heure avant la fermeture de la grille. Nous sommes néanmoins chanceux.

 

Après seulement quelques minutes, nous tombons sur un groupe de koudous, principalement des mâles. D’autres apparaissent ici et là. Nous apercevons aussi quelques autruches, les premières du voyage. Au loin, nous devinons les éléphants, emblèmes du parc. Il ne faut pas longtemps pour tomber nez à trompe avec certains d’entre eux. Toute une famille avec beaucoup de jeunes d’âges divers est en train de manger au bord de la route. Le passage est bloqué vu que certains traversent tranquillement. Le plus petit d’entre eux, un jeune mâle d’à peine quelques mois, a l’air passablement excité, ce qui tranche avec la placidité du reste du groupe. Il ne cesse de pousser, de poursuivre ou de grimper sur un de ses frères plus âgé, le tout après avoir essayé de téter un peu partout. De temps en temps, il s’agenouille pour frotter le haut de sa trompe sur le sol. Du coup, nous restons un bon moment à les observer.

 

Nous poursuivons la boucle jusqu’au point de vue implanté au sommet d’une colline. En contrebas, un trou d’eau a été aménagé. Les oiseaux s’y font rares à cette heure tardive, mais deux éléphants viennent s’y désaltérer. L’endroit offre un panorama particulièrement intéressant sur les alentours. Avec les jumelles, je peux ainsi distinguer plusieurs dizaines d’éléphants disséminés dans la végétation composée d’arbres bas. Souvent je ne distingue que les dos lorsque nous sommes au ras du sol.

 

L’heure a tourné et il est grand temps de retourner au camp. Nous repassons la grille avec seulement cinq minutes d’avance sur l’horaire fatidique. Il ne faut pas oublié de restituer la plaque de plastique rouge qui nous a été confiée à l’entrée. Quelle est son utilité, cela reste un mystère. Une fois le campement monté et une douche bienfaisante prise, je pars explorer la zone d’accueil du parc qui se révèle très bien aménagée. Hormis la traditionnelle boutique, on y trouve un restaurant. Pour les amateurs d’avifaune, un affût à oiseaux a été construit près d’une mare plantée de végétation aquatique. Mais à cette heure tardive, ils sont tous partis nicher. Plus un chant. Face au restaurant, un trou d’eau peut accueillir les mammifères. Une terrasse accueille les curieux avec des bancs pour les longues observations. Des spots orangés sont prévus pour faciliter la vision nocturne. Avant que la nuit tombe, c’est un groupe d’une dizaine de koudous qui y traîne.

 

Nous y revenons à la nuit, le ventre rempli d’un morceau de bœuf grillé toujours aussi succulent. Malheureusement, cette fois, pas la moindre trace animale. Seul un petit oiseau gambade autour des mares. Le lieu reste apaisant, sans bruit de civilisation, juste les sons de la brousse. A un moment, nous sommes bercés par quelques chants traditionnels africains en provenance de la salle de restaurant.

 

 

Jeudi 5 novembre, Addo Elephant Park

 

 

Réveil aux aurores ce matin pour essayer de profiter au maximum du parc. Dès 6h30, nous passons les grilles. Nous retournons d’abord vers la boucle d’hier. Ce matin, elle a été désertée par les pachydermes. Seuls deux canards barbotent dans le point d’eau au pied du point de vue. En revanche, koudous et autruches sont toujours là. Quelques tortues du bush montrent leur carapace.

 

Nous nous mettons ensuite en quête d’un hypothétique lion. Nous croisons d’abord deux jeunes chacals, magnifiques dans cette lumière matinale, et pas du tout impressionnés par notre présence. Nous approchons une autruche bien peu farouche à moins de deux mètres. Ainsi nous avons tout loisir de la détailler, ses gros yeux à particulier. Plus tard, c’est un bubale qui nous laisse le photographier sans broncher. Nous revoyons plusieurs de ses congénères. Régulièrement, nous distinguons des phacochères petits ou grands qui trottinent dans les espaces ouverts.

 

Au hasard d’un virage nous trouvons un buffle en train de brouter très paisiblement sur le bas-côté. Jamais je n’en ai eu un aussi près de moi sans être surveillé. Il approche à deux mètres du véhicule sans même y prêter attention, continuant à paitre sereinement. La scène est plutôt impressionnante avec une telle masse si proche. Nous croisons encore quelques tortues de toutes tailles avant d’atteindre un nouveau point de vue élevé. Le panorama est large mais la végétation épaisse empêche de distinguer le moindre félin. Nous redescendons vers la grande plaine que nous venons d’apercevoir. En chemin, nous croisons un couple qui nous dit avoir aperçu des lions sur cette Gorah Loop. L’espoir s’emballe dans le véhicule. Nous voyons bien l’éléphant solitaire ainsi que l’autruche derrière ainsi que de nouvelles tortues. Mais pas encore de lion. Au point d’eau situé à l’extrémité de la boucle, la faune semble s’être animée tout d’un coup. Autour d’une famille d’éléphants, nous pouvons voir de nombreux bubales, quelques zèbres qui ont fait leur apparition ainsi que deux hérons cendrés.

 

Sur la piste quittant cet endroit, nous tombons sur quelques voitures à l’arrêt. Il  s’agit tout simplement d’un éléphant en train de remonter la piste. Tout le monde se serre et se tient sur ses gardes. Après cela, nous retrouvons une nouvelle famille d’éléphants dans un secteur proche de celui de la veille, peut être les mêmes avec cette fois un petit assagi. Enfin, les derniers à se montrer sont les koudous, juste avant que nous franchissions définitivement la grille.

 

Je mets à profit la demi-heure accordée par Carrel pour retourner à l’affût aux oiseaux. Ce matin, la mare est pleine de vie, surtout des tisserins mais aussi de beaux et immanquables euplectres  ignicolores avec leur plumage rouge et noir.

 

Il est temps de reprendre la route, d’abord plein sud vers Port Elizabeth. Nous apercevons un marais salant et ses teintes rougeâtres, juste avant d’y arriver. Nous obliquons ensuite vers l’ouest sur la route dite des Jardins. Ce faisant, nous passons au-dessus de plusieurs gorges vertigineuses. La plus profonde étant celle de la Storms River. Le paysage devenu montagneux nous conduit jusqu’à Plettenberg Bay, enfin seulement à l’entrée, dans un « resort » qui a changé de nom comme celui de la Blyde River. Nous sommes accueillis par un fin crachin déprimant après le soleil et le ciel bleu du matin. Les tentes sont montées en moins de deux. Carrel nous propose de remplacer la sortie à la plage par une visite de Knysna (à prononcer « Nasna » !). Située à une trentaine de kilomètres, elle ne présente qu’un intérêt limité. Aucun édifice d’époque. Que du moderne le long des quais de la marina. Il est en revanche affligeant de voir ce vis-à-vis entre le township sur la colline, fait de bric et de broc, abritant les employés noirs de la ville, et en face en Thesen Island sur la lagune où sont édifiées les villas des riches. Les deux se font face avec une proximité qui dérange. De même que me dérange ces longues colonnes de gens qui remontent sur la colline à la fin de la journée. Tout n’est pas encore réglé ici : chacun vit dans son coin.

 

Nous revenons au camp où la pluie s’est arrêtée. En revanche, il n’y fait pas très chaud. Cela ne nous empêche pas de finir la soirée en fous rires. Nous avons comme voisins deux oies d’Egypte et deux ibis Hagedash qui semblent avoir élu résidence sur les vertes pelouses du Forever Resort de Plettenberg.

 

 

Vendredi 6 novembre, Plettenberg Bay

 

 

Nous commençons la journée par un réveil tranquille. C’est presque une grasse matinée. Nous avons tout le temps de nous préparer et d’être à l’heure.

 

Vers 8h15, nous nous mettons en route jusqu’au bord de la mer dans Plettenberg Bay. La journée est bien ensoleillée et la température monte tout près de l’eau. Nous patientons jusqu’à 9h30 pour partir une fois équipés d’un gilet de sauvetage, nous nous dirigeons vers la plage voisine où est posé le bateau qui doit nous emmener voir les baleines en mer.

 

Assez bizarrement, la coque n’est pas à l’eau mais posée sur le sable au sec. Une fois embarqué, je comprends le système : un tracteur va nous pousser à l’eau. D’ailleurs dès que nous l’abordons, le pilote met les gaz et vogue la galère. Cela tape dur sur les premières vagues proches de la plage. Mais ce n’est rien par rapport à la suite. Nous filons vers le large, au sud-ouest. Plus nous avançons, plus la mer se forme. Certains creux sont même impressionnants à tel point que le pilote doit ralentir l’allure pour les passer.

 

Nous doublons la péninsule de la réserve de Robberg, puis continuons de plus belle. Sur la côte rocheuse, les vagues se fracassent dans un blanc moutonnement. Le bateau nous emmène jusqu’à l’endroit où les baleines ont été vues pour la dernière fois (allez savoir quand ?!?). Commence alors l’attente et la surveillance. La coque à l’arrêt est ballotée en tous sens, idéal pour faire monter le mal de mer. Finalement, après de longues minutes de patience, nos accompagnateurs repèrent quelque chose. Un premier dos de baleine apparait furtivement. Alors que ces cétacés paraissent très lents à se mouvoir, leurs apparitions sont courtes. Deux ou trois passages en surface avant qu’elles plongent un long moment. Et pour l’endroit de réapparition, c’est carrément la loterie. Ainsi nous observons d’abord un gros mâle, puis une mère avec son baleineau. Pendant une bonne demi-heure, nous essayons de les suivre. Souvent ils apparaissent par un souffle, puis le dos noir et le petit aileron. Jamais la queue, même si nous l’espérons vivement. Parfois, nous n’en sommes pas loin du tout. Les photographies sont aléatoires tant le bateau bouge en tous sens. Néanmoins, quelques clichés semblent à peu près réussis.

 

Sur me chemin du retour, nous retrouvons une femelle avec son petit. Les mêmes scènes se répètent. Passés la pointe de la péninsule de Robberg, nous virons à  bâbord le long de la falaise. Nous commençons à voir quelques otaries du Cap sur les rochers. Quelques-unes avaient déjà été aperçues dans l’eau lors de notre passage aller. Tout le long de la péninsule, elles prennent le soleil au sec et batifolent dans les flots. Certaines se regroupent en masses sombres avec la nageoire pointée en l’air : pour quelle raison ? Cela reste un mystère. Par endroits, la colonie est dominée par une « escadrille » de petits cormorans du Cap nichés juste au-dessus des otaries.

 

Cette fois, c’est vraiment la fin de la ballade après environ deux heures de navigation. Nous retournons vers la plage de départ. A quelques encablures du sable, les moteurs sont coupés, le bateau face à la côte. Le guide nous indique que devons nous accrocher. Nous prenons cela pour une plaisanterie. Qui n’en est pas une ! Subitement les moteurs sont poussés à fond. Résultat, le bateau finit sur le sable. Et gare à ceux qui ne se tenaient pas ! C’est une arrivée sportive et originale. Elle se révèle presque encore plus impressionnante lorsqu’on l’observe de l’extérieur. De retour à l’agence, une boisson chaude nous est offerte.

 

Tranquillement approche l’heure du pique-nique que nous prenons au bord de la plage. J’aurais bien aimé profiter de l’océan  mais l’eau était vraiment trop froide. J’avais les pieds gelés. Il ne restait qu’à comater sur le sable pendant que quelques courageuses résistaient dans l’eau. Il faut aussi faire attention aux goélands qui semblent adorer voler très près du sol.

 

Vers 15h, nous quittons la plage pour le ravitaillement  puis le camp. Il fait de suite moins chaud dans la vallée de la Keurbooms malgré le soleil. Je profite des rayons solaires pour aller explorer l’extrémité du complexe et les bords de la rivière. Rapidement nous ressentons tous le froid, probablement le contrecoup de l’exposition au soleil. Du coup, nous rejoignons nos tentes bien plus tôt que d’habitude pour nous mettre au chaud dans nos sacs de couchage.

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