Pérégrinations chiliennes (3)

Publié le par Jérôme Voyageur

Dimanche 11 février 2007, Santiago du Chili

 

 

La nuit fut courte. Notre chauffeur vient nous récupérer à 8h20. Autant dire que le temps est compté pour prendre le petit-déjeuner, surtout que la serveuse ne semble pas très vive. Néanmoins, nous arrivons à l’aéroport avant l’heure prévue. Pas de risque de louper notre avion. Il ne reste plus qu’à enregistrer les bagages sur les cartes d’embarquement récupérées la veille à Arica. Une simple formalité dans cet aérogare moderne et suffisamment grand ! En milieu de matinée, nous décollons pour Puerto Montt, dans la région des lacs, plus au sud. 1h40 plus tard (soit un peu plus de 1000 kilomètres) nous posons les pieds sur une terre bien verte par rapport à ce que nous venons de vivre pendant une semaine ; la piste se déroule entre les arbres. Notre nouvelle guide, Tatiana, et Patricio, notre nouveau chauffeur, nous y attendent. De l’aéroport, nous partons directement vers la ville, et plus précisément sur les hauteurs pour avoir une vue d’ensemble de cette ville apparue là au 19ème siècle par volonté de coloniser le sud du territoire. Tatiana confirme nos impressions : cette ville ne présente pas beaucoup d’intérêt. Une ville trop moderne à l’architecture désordonnée. Quelques pas dans le centre-ville nous confirment cette première impression. Et nous constatons aussi la touche allemande avec cette profusion de couleurs, pas forcément toujours heureuses d’ailleurs. La visite de l’église peut être évitée : de loin, elle peut sembler attrayante avec ses allures de temple grec en bois, surmonté d’un clocher ; mais en approchant et en y pénétrant, elle ne présente pas grand charme. Quelques pas sur la promenade permettent de se faire une idée et de regarder la baie de Reloncavi, avant goût du Pacifique, au cœur de laquelle sont posées quelques îles et tout autour des parcs à saumon pour l’élevage.

 

En suivant les quais vers l’ouest, nous arrivons à Angelmo. C’est le quartier des pêcheurs qui viennent y débarquer le produit de leur pêche et le vendre. De petites gargotes sont installées tout autour du marché mais visiblement seuls les chiliens semblent y manger. Les fruits de mer sont débarrassés de leurs coquilles et mis en conserve. Le saumon est vendu nature ou légèrement fumé à des prix ahurissants (entre 2 et 3 € le kilo !). Au dessus du marché, face à la baie, se sont installés des restaurants plus « adaptés » aux touristes. Tout autour, les oiseaux (principalement des goélands) se rassemblent dès qu’un pêcheur sort des déchets. On trouve là aussi un petit marché aux fruits et légumes. C’est l’occasion de voir des spécimens aux tailles impressionnantes. Cela a l’air de très bien pousser dans la région. Les quelques types d’algues vendues sont par contre beaucoup moins à notre goût, surtout celle qui ressemble à un tuyau marron (sans façon !!!). Tout près, une série de petites boutiques proposent de nombreux articles artisanaux (laine, bois, vannerie, coquillages, cuir, …). Dans la rue attenante, elles ont même un petit cachet avec leur structure en bois et les peintures plutôt vives. Nous continuons vers la baie de Chinquihue où sont rassemblées la plupart des entreprises de transformation du saumon. C’est le cœur « industriel » de Puerto Montt. Quelques restaurants se sont nichés dans la verdure, non loin de là, face à l’océan, du moins à cette mer intérieure que forme la baie. C’est dans l’un d’entre eux, le Kiel, que nous nous restaurons, dans un cadre très maritime, toute la décoration tournant autour des bateaux. Les amateurs de fleurs seront ravis par le jardin : les essences sont multiples et toutes très colorées, même les hortensias.

 

Dans l’après-midi, nous partons vers le nord jusqu’à Puerto Varas au bord du lac Llanquihue, distant d’à peine une vingtaine de kilomètres. Nous avons un peu l’impression de nous retrouver dans un coin de campagne germanique. Ne serait ce qu’en apercevant l’église, reproduction d’un édifice de la Forêt Noire. Il faut imaginer un édifice plutôt imposant, de couleur claire, avec les toits rouges et les encadrements ainsi que les angles de couleur marron : je revois des la Bavière ou l’Autriche ! Le style architectural de la ville ne trompe pas non plus, encore une fois par les couleurs employées. Même les desserts proposés dans les restaurants ont subi cette influence. Heureusement, certaines maisons ont un aspect traditionnel : elles sont bâties en bois et recouvertes de plaquettes d’alerce (un mélèze), un bois local très résistant. En descendant dans la ville, nous aboutissons sur les rives du lac Llanquihue, le quatrième d’Amérique Latine avec presque cinquante kilomètres d’un bord à l’autre. Avec le vent qui souffle formant de belles vagues, il a même des aspects océaniques. D’ailleurs, sur plusieurs kilomètres, des plages bordent le lac, en faisant un lieu de villégiature très couru (nous avons même eu aux bouchons de fin de journée au retour des plages !) et disposant d’une infrastructure hôtelière complète pour toutes les bourses et tous les genres de touristes. Sur la promenade, non loin de la place d’armes, une avancée sur lac abrite l’office du tourisme qui vous permettra d’obtenir de nombreuses informations sur toutes les activités et sites à voir dans la région. Pour les esprits joueurs, Puerto Varas accueille aussi un des rares casinos du pays ; les machine à sous y semblent légion. Cette ville présent vraiment toutes les caractéristiques de nos cités balnéaires, avec aussi ses défauts. Heureusement, le cadre est vraiment magnifique.

 

En effet, en levant les yeux, nous pouvons admirer le superbe volcan Osorno (2652 mètres) qui nous domine, juste de l’autre côté du lac. Il présente un cône quasi parfait, toujours paré de blanc dans sa partie supérieure du fait de la présence de neiges éternelles, et bien heureusement éteint. Il est parfois considéré comme le Fuji Yama local ! Durant l’hiver austral, les amateurs de ski peuvent profiter des pistes tracées sur ses flancs. Sur la droite, nous pouvons apercevoir le Calbuco (seulement 2003 mètres) bien reconnaissable avec sa tête déchiquetée : lui est toujours actif.

 

En longeant le sud du lac sur une cinquantaine de kilomètres, juste après le village d’Ensenada qui sert de point de départ pour monter à l’Osorno, nous pénétrons dans le parc national Vicente Perez Rosales, le plus ancien du pays puisque créé en 1924. Plusieurs fois sur le trajet, la route et ses lacets réservent de belles vues sur le lac. Il y a même un petit parking avec vue sur l’Osorno et possibilité d’acheter tout un tas de gourmandises dans le kiosque voisin ; l’endroit idéal pour faire une pause ! C’est en entrant dans le parc que nous apercevons enfin la rivière Petrohue. Du fait des minerais arrachés aux montagnes voisines (principalement le Cerro Tronador, 3491 m), le cours de la rivière prend de superbes teintes émeraudes. Différents points de vue permettent de l’apercevoir et de s’en approcher, à condition de se déplacer de rocher en rocher jusqu’au bord de l’eau. Souvent, nous apercevons quelques petits rapides. La route bitumée a aussi laissé sa place à une piste : c’est le retour de la poussière.

 

La piste se termine d’ailleurs au village de Petrohue, sur les rives du lac Todos Santos (ainsi nommé suite à sa découverte par des religieux jésuites le jour de la Toussaint en 1670). Ce petit village de bois se niche dans la forêt au pied du majestueux Osorno. En fait, il faudrait plutôt parler de site touristique plutôt que de village. Je n’y ai vu trace que de petites boutiques et d’un hôtel. Une plage de sable noir (d’origine volcanique) accueille les vacanciers. Il faut reconnaître que son apparence ne nous tente pas vraiment, ce qui n’est pas le cas des vacanciers chiliens. Néanmoins, nous n’en voyons aucun dans l’eau. Quelques petits bateaux qui tiendraient plus de la barque de tourisme sont semi échoués sur la plage. Dans la gamme supérieure, un petit bateau assure la liaison vers l’autre bout du lac, ce qui permet ensuite de rejoindre l’Argentine voisine. D’ailleurs, en regardant dans cette direction, nous apercevons l’île Margarita qui présente la particularité d’être privée ! Ce lac, contrairement à son grand voisin, est très étroit, tout en longueur et enserré dans de hautes falaises la plupart du temps recouvertes de conifères. Sur la droite du ponton, le lac s’écoule dans la rivière Petrohue qui, elle, se jette dans la baie de Reloncavi. Dans le passé, elle alimentait le lac Llanquihue mais une éruption de l’Osorno en a décidé autrement. Quel changement que de voir toute cette verdure et ces forêts un jour après avoir quitté le nord désertique. En y regardant de plus près, nous nous rendons compte que cette forêt semble encore préservée des nuisances de l’homme (mais pour combien de temps encore ?). De la plage, nous apercevons aussi le volcan Puntiagudo (2493 mètres) en retrait de l’Osorno, à la forme reconnaissable, fin et pointu, d’où son nom. Le cadre est spectaculaire : il aurait mérité moins de nuage ; néanmoins, la couverture était assez haute pour nous laisser profiter du lieu.

 

Sur le chemin du retour, nous faisons une halte à la cascade de Petrohue, « Salto del Petrohue » dans le texte. Mais sur le chemin, il ne faut pas manquer la « fenêtre », une ancienne coulée de lave qui ouvre dans la végétation dense un point de vue privilégié sur le volcan Osorno. Il est difficile de rater le point d’accès à la cascade : il y a toujours des véhicules arrêtés sur le parking ou sur le bord de la piste. Dans la guérite, un garde vous demandera 1200 petits pesos pour poursuivre votre chemin dans cette partie du parc. Le chemin piétonnier est jalonné de panonceaux précisant le nom des arbres locaux. Mais il est rapidement difficile de les retenir tous sauf à prendre à chaque fois, et l’arbre et le panneau en photo. Parvenus au bord de l’eau, des passerelles nous permettent de voir la cascade sous tous les angles. Il faut reconnaître que le débit est assez faible en cette période estivale ; il laisse néanmoins présager du spectacle dans ses étroites gorges basaltiques. C’est aussi le paradis des truites sauvages qui pullulent juste sous le pont. Il ne faut pas s’attendre à une grande et haute cascade, ni même à des chutes telles celle Victoria, mais plutôt un très gros rapide qui prend toute sa puissance en s’engouffrant dans cet étroit passage. En revanche, juste après les remous, en s’apaisant, l’eau reprend ses superbes teintes émeraude.

 

Nous restons sur ces images d’eaux émeraude et nous retournons à Puerto Varas où se trouve notre pension (Pilos) pour la nuit, à l’extrémité de la baie : un édifice chaleureux, tout en bois, peint de jaune et de bleu, face au lac, mais aussi battu toute la nuit par le vent (un avant-goût patagonien !). Pour rejoindre le centre de la ville et augmenter le choix de restaurants, il faut marcher un bon moment sur la promenade. Autant dire que cela ouvre l’appétit à l’aller et fait digérer au retour ! Mais si tout le monde avait été d’accord, nous aurions pu manger tout près !

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