Pistes de Zambie et du Malawi (2)

Publié le par Jérôme Voyageur

Mardi 19 juillet 2005, South Luangwa National Park, Lukonde Camp

 

 

Dès les premières lueurs de l’aube, tout le monde est levé, surtout ceux qui se sont levés nuitamment pour observer les visiteurs. Après un petit déjeuner rapidement avalé, nous retournons dès 6h30 dans le parc dans l’espoir de voir quelques prédateurs de retour de chasse. Malheureusement, nous en sommes pour nos frais. Pas l’ombre d’une bête pendant la première heure. La fraîcheur matinale les dérange. Il y a bien de ci, delà quelques éléphants tapis dans les sous-bois, quelques oiseaux pour passer le temps. Nous en profitons donc pour nous enfoncer vers le sud du parc.

 

Petit à petit, quelques groupes d’impalas commencent à apparaître dans les rayons de soleil. Dans une petite mare qui ne paie pas de mine, recouverte qu’elle est de salades d’eau, nous apercevons d’abord le dos d’un hippopotame prenant tranquillement son bain, tandis qu’un Jabiru, une grosse cigogne noire et blanche avec son bec bariolé de jaune, de rouge et de noir, lui tourne autour, tentant désespérément de pêcher quelque chose ! Nous sommes comblés, quand, à la recherche d’une mare, qui se révèle finalement asséchée, nous tombons sur un couple de lions. Ils dorment paisiblement ou plutôt ils récupèrent ! C’est la saison des amours. Pendant notre heure d’observation, nous aurons la chance de les voir s’accoupler deux fois ! Mais l’arrière-plan est tout aussi intéressant : un impala mâle ayant repéré les deux fauves, au demeurant bien peu intéressés, fait un large détour discret pour rejoindre son groupe ; quant aux phacochères au loin, ils vaquent à leurs occupations sans même soupçonner la présence des félins.

 

Un peu plus loin, c’est une girafe de Thornycroft, espèce endémique au parc, qui nous barre la piste, mâchouillant tranquillement quelques feuilles. A y regarder de plus près, à travers les feuillages, ce sont des paires de pattes et des queues qui apparaissent ! Elles sont finalement quatre à parader en contrebas de la piste. On peut les reconnaître à leurs taches plutôt sombres et au fait que leurs pattes sont claires, du pied au genou, comme si elles portaient des chaussettes ! Nous poursuivons notre boucle jusqu’à apercevoir quelques éléphants  tentant de traverser la piste. Nous les laissons faire et rebroussons chemin jusqu’au trou d’eau tout proche, lui aussi entièrement recouvert de verdure. Tous les points d’eau, hormis la rivière, sont ainsi recouverts. Ce ne sont d’abord que quelques pintades casquées, reconnaissables à l’excroissance bleue sur leur tête, et un petit varan, d’une quarantaine de centimètres, qui nous occupent. Avec un peu de patience, nous voyons arriver notre troupe de pachydermes. Un groupe de six individus vient se désaltérer. Et bien évidemment, le plus petit fait le spectacle. Toutes oreilles déployées et trompe tendue, il fonce vers les pintades en leur soufflant dessus. Sûrement un petit mâle qui veut s’affirmer. Le varan n’avait pas demandé son reste dès leur arrivée en se réfugiant sous le bosquet voisin. Après leur départ, c’est le tour de trois phacochères de venir boire, agenouillés, évidemment. Enfin, nous repartons car la mi-journée approche.

 

En chemin, nous tombons sur de nombreux zèbres ainsi qu’un grand koudou mâle paisiblement installé à l’ombre d’un arbre. Dommage, une de ses cornes est cassée presque à la base. Plus loin encore, nous dévorons des yeux une femelle babouin : tout simplement à cause de son petit qui nous fait craquer, un coup sur le dos de sa mère, un coup pendu sous son ventre, une autre fois courrant derrière elle et tentant de lui grimper dessus. Décidément, c’est l’heure de rentrer : nous manquons de percuter une éléphante et son tout petit, surgis de nulle part à travers cette dense végétation.

 

De retour au campement, nous retrouvons la colonie d’hippopotames qui est de retour et Béa qui était de garde, pour parer les incursions des babouins et vervets. Après une bonne salade d’été bienvenue, nous profitons de la pause pour prendre une bonne douche, elle aussi bienvenue ! Certaines bouquinent, d’autres photographient, d’autres encore observent. C’est comme cela que j’aperçois un nouveau Jabiru mais beaucoup plus sale et donc moins flamboyant que les précédents. On devient vite difficile !

 

15 h arrive et nous repartons pour le safari de l’après-midi. Nous nous dirigeons à nouveau vers le sud du parc mais cette fois-ci en essayant de longer au maximum la rivière. C’est là que les chances sont les plus grandes de faire des rencontres, près de l’eau. Nous commençons par traverser une épaisse forêt dans laquelle la piste s’enfonce comme dans un tunnel végétal. Ces forêts alternent avec de plus ou moins larges étendues dégagées et verdoyantes qui font le bonheur des ruminants. Ils voient ainsi arriver leurs prédateurs de loin. Nous apercevons régulièrement des troupes d’impalas ou de pukus, qui sont magnifiques dans cette lumière chaude et pure : leur robe est encore plus soyeuse.

 

C’est donc à l’abord d’une de ces étendues que nous apercevons devant nous un couple de calaos géants terrestres, tout noirs avec leur face rouge. Les autres calaos, bien plus petits, sont ridicules à côté ! Mais on a du mal à imaginer ceux-ci en vol tellement ils sont gros. Et puis, en levant les yeux, nous discernons une girafe en train de s’alimenter sur un petit arbre. Quelle n’est pas notre surprise, en approchant très silencieusement, de découvrir qu’il y a en fait une nurserie. Trois girafons sont là dont le plus jeune a peut-être un mois. Il découvre le monde et inspecte prudemment le merle métallique qui l’approche. Ces trois-là sont adorables, « assis » par terre au bord de la piste. Puis une femelle remonte de la rivière et les rejoint. C’est l’heure de la tétée pour un des trois. Vient ensuite une seconde femelle et un mâle, toujours du même endroit : deuxième allaitement. Le mâle poursuit pour aller chercher la première femelle près de son arbuste et la ramener dans le groupe. Comment ne pas craquer devant un tel spectacle offert par une nature préservée ? Nous restons là une bonne heure à profiter de ces instants magiques.

 

Mais il faut bien poursuivre ! C’est au bord de la rivière que nous trouvons une sorte de promontoire naturel juste en surplomb d’un groupe d’hippopotames. Là encore, grand spectacle. Au départ, tous vautrés lamentablement sur a plage, il ne faut qu’un cri du « chef » pour que la troupe  s’ébroue au pas de course direction la rivière. En moins de temps qu’il ne faut pour le dire, il n’y a quasiment plus trace de leur présence, si ce n’est quelques narines qui dépassent à la surface ! C’est alors que deux mâles décident de se mesurer. Les gueules s’ouvrent largement, les canines s’entrechoquent, et les appareils photos crépitent. Un assaut puis un second, et puis tout se calme à nouveau, comme souvent chez les hippos, tout ceci éclairé par une lumière qui devient rasante.

 

Un peu plus loin, nous retrouvons notre famille de girafes (et dire qu’elles ne sont que 300 de cette espèce ; nous en avons déjà vu une dizaine aujourd’hui ! Nous sommes vraiment chanceux). Alors que la lumière baisse, c’est une troupe de cobes à croissant qui clôture notre très belle journée. Retour au campement pour un bon repas et un café siroté autour du feu, désormais devenu traditionnel pour nous. Et une nuit des plus calmes, du moins pour moi qui n’aie rien entendu !! Finalement, les nuits africaines me réussissent bien ! En revanche, je ne risque pas d’apercevoir nos visiteurs nocturnes. J’écouterais le récit de la nuit demain au petit-déjeuner !

 

Mercredi 20 juillet, South Luangwa National Park, Lukonde Camp

 

 

Nous commençons à bien prendre le rythme : pas besoin de réveil, tout le monde est levé en avance. Un petit déj’ vite avalé et en route pour de nouvelles aventures. Assez rapidement, après avoir dépassé Mfuwe Lodge, nous tombons nez à nez avec quelques buffles campés au beau milieu de la piste. Nous approchons au ralenti pour éviter de les brusquer. Mais nous ne nous doutions pas de la suite. A gauche comme à droite, des buffles à perte de vue aussi loin que notre regard peut porter. C’est réellement impressionnant et on se sent tout petit devant cette masse. Il y a d’adorables bufflons avec leurs « embryons » de corne qui tètent encore à leur mère et de gros mâles magnifiquement casqués. Ils sont peut être plus de quatre cent à se déplacer comme un seul buffle, probablement vers un point d’eau. Le spectacle est fascinant dans la lumière crue du matin, avec la poussière soulevée. Prudemment, nous traversons le troupeau et tentons de les suivre : nous sommes toujours sous surveillance, les mâles veillent au grain. En chemin, deux jeunes mâles s’affrontent, tête contre tête. Finalement, nous parvenons au bord d’une lagune. C’est là que certains tentent de se désaltérer dans un mince filet d’eau. Quel moment magique offert par ce troupeau. Après tous ces embêtements, nous les laissons tranquilles et nous dirigeons à travers les espaces ouverts vers les bords de la rivière.

 

Pukus et impalas sont de sortie en grand nombre, quelques zèbres flânent ici et là. En fin de matinée, ce sont les cobes à croissant qui refont leur apparition. Tous ces ruminants se régalent sur les berges herbeuses de la Luangwa. Une dizaine de vautours attirent notre attention au sommet des arbres mais impossible de découvrir leur cible. Nous nous rabattons donc sur les petits oiseaux aux couleurs chatoyantes : d’abord des guêpiers malheureusement à contre-jour, des inséparables verts, au doux chant mais impossible à fixer sur la pellicule, puis par deux fois un magnifique rollier à longs brins qui semble prendre la pose d’abord sur une branche puis au bord de la piste. Voici un oiseau magnifique avec tout ce mélange de couleurs ; on croirait la palette d’un peintre : son ventre lilas qui se dégrade ensuite en une série de bleus, sa tête aux teintes vertes, ses sourcils blancs, …. Et que dire de ce merle à longue queue dont on croit qu’il est tout noir. Mais une observation aux jumelles permet de découvrir de superbes reflets bleus violets qui changent à chaque fois qu’il bouge par rapport au soleil. Que la nature est artiste, tout de même !

 

Le long des berges, c’est d’abord deux têtes de girafes au loin qui attirent notre attention avant que nous passions dans une forêt d’ébènes : calme, ombre et douceur !! Au sortir de cette zone arborée, nous avons la surprise de découvrir une vingtaine de zambiens en train de jouer au foot sur la rive opposée : on pourrait rêver pire comme cadre ! Pas besoin de grand stade tout compte fait. Sur le chemin du retour, nous tombons à deux reprises sur un groupe d’éléphants, d’abord dans le parc avec un gros mâle pourvu de belles défenses, puis à l’extérieur, juste avant le camp : ils sont une bonne quinzaine à manger tranquillement. Peut être ceux qui nous rendent visite tous les soirs ? Il faudrait leur demander !

 

La pause de la mi-journée nous permet de profiter de la douche sommaire mise à notre disposition au camp ; certains écrivent, d’autres lisent, d’autres encore cherchent le cliché parfait. Les heures chaudes de la journée sont consacrées au farniente. Mais à 15 h, branle bas de combat. Nous repartons, direction le nord en longeant, là encore, au maximum la rivière. Les rencontres sont pendant un bon moment assez rares : quelques ruminants disséminés dans les hautes herbes ou les sous-bois, un éléphant qui traîne en bord de piste, quelques phacochères impassibles ou encore divers oiseaux bien dissimulés dans le décor : les jumelles sont alors indispensables pour les distinguer.

 

Et puis, plus tard, Fred et Béa nous conduisent à une nouvelle lagune, bien plus grande que les précédentes. Sa surface est quasi entièrement recouverte de salades sauvages aquatiques. Il est facile d’imaginer que c’est le paradis des hippopotames. Seuls leurs yeux et leurs narines émergent de cette immensité verte. Il y a aussi de nombreux jacanas, jeunes et adultes, qui démontrent leurs prouesses pour la marche sur l’eau : un vrai ballet. Souvent un dos d’hippo sert de rocher à un jacana ou à un ibis sacré. Encore un endroit merveilleux ! En contournant la lagune, nous trouvons un autre point de vue nous permettant d’apprécier les évolutions de ces mastodontes. Quelle n’est pas notre surprise d’assister à un accouplement. On ne voit, en fait, que le mâle qui se redresse hors de l’eau, grimpé qu’il est sur la femelle, contrainte pour sa part, à rester sous l’eau. C’est tout juste si il lui laisse le temps de remonter respirer !! Et cela dure, dure, dure, … Quelques jeunes prennent des leçons à s’approchant de très près. Ou alors jouent les curieux ? Encore une fois aujourd’hui, nous avons la chance d’assister à un moment rare. Nous avons aussi pu remarquer leur comportement lorsqu’un grognement part. Ce n’est au départ que le fait d’un seul individu mais immédiatement tout le groupe répond, ce qui peut provoquer un joyeux tintamarre pour de grands groupes !!

 

En rentrant tranquillement, nous tombons sur deux très jeunes éléphanteaux seuls dans les hautes herbes. Bizarre !! Et surtout méfiance, il ne faudrait pas se faire charger par la mère. Nous ne nous éternisons donc pas. Plus loin, juste en face du camp, nous retombons sur un autre groupe qui attire notre attention par le barrissement d’un gros mâle. Fred se rend compte que nous assistons à un rituel amoureux : ce mâle est en plein must. La femelle fait tout ce qu’elle peut, en venant se frotter, pour aguicher et exciter le mâle. Malheureusement, cela ne se fera pas tout de suite. Sinon, nous aurions eu droit à deux accouplements dans la même après-midi.

 

L’heure de fermeture du parc approche et nous devons partir. Mais décidément, il est écrit que c’est la journée des éléphants. A quelques centaines de mètres du pont, nous sommes bloqués par un barrage d’éléphants. D’abord une mère et son petit, puis une seconde femelle sont installés au milieu de la piste pour déguster un acacia sur le bas-côté. Ce sont finalement quatre véhicules qui se retrouvent bloqués. Et dans ce cas-là, il faut attendre que les mastodontes se décident à bouger. Inutile de tenter de forcer le passage, ce serait une charge assurée. Ils sont sympas car nous n’aurons finalement que dix minutes de retard à la grille ! Inno doit se demander ce qui nous arrive, lui qui est resté de garde au campement.

 

Pendant le repas, en pleine obscurité, nous avons encore la chance d’observer une troupe d’éléphants progressant au milieu de la rivière, sur les bancs de sable, en plein territoire hippo. C’est vrai qu’on manquait de pachydermes à cet endroit !

 

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