Flâneries en Val de Loire
Juin 2002
C’est que ça a du bon les 35 heures ! Partir un long week-end de trois jours. S’évader de la capitale quitter la pollution des grandes villes pour rejoindre la douceur des bords de Loire.
Et pour s’assurer de la réussite d’un tel week-end, il faut tout d’abord dénicher un port d’attache (si, si, on trouve des ports sur la Loire : pas bien grands mais il y en a). Celui que j’ai trouvé se situe à Bréhémont, un petit bourg paisible installé sur la rive gauche de la Loire, à quelques kilomètres de Villandry. On y vit calmement ; la circulation étant très rapide, on entend les oiseaux gazouiller, quelques enfants jouer. L’essentiel des maisons du bourg sont bâties en belles pierres de taille (probablement le tuffeau local).
Le gîte d’étape que je vous propose n’échappe pas à la règle, installé en plein centre du village entre l’école et la mairie, juste au-dessus de la bibliothèque. Ce gîte est une solution idéale pour les petits budgets : seulement 6€ la nuit. Pour ce prix là, vous dormez dans un dortoir de 20 lits (un peu comme en refuge !!). Une cuisine bien équipée (cuisinière, frigo, vaisselle) est à votre disposition ainsi que deux salles de bain. Par contre, n’oubliez pas d’appeler pour réserver sinon vous risquez de finir à la belle étoile : surtout que la secrétaire de la mairie qui répond à vos appels est très sympa. Pas de soucis pour récupérer les clés : en dehors des heures d’ouverture de la mairie, on vous les dépose au seul restaurant du bourg.
Voilà l’installation terminée. Reste plus qu’à chausser les baskets et partir à la découverte de cette accueillante région. Mais avant cela, une bonne nuit de sommeil fera le plus grand bien pour être d’attaque.
Le réveil « tinte », le soleil commence à briller : il est temps de se mettre en route pour ce qui sera la plus longue étape du week-end. C’est que le joyau du Val de Loire est tout de même à 80 km de Bréhémont. Chambord, demeure royale, s’il en est. C’est vrai qu’il en impose quand on l’arpente. Cependant, il m’est apparu bien petit quand j’ai débouché de la grande allée qui lui fait face. Ce n’est qu’en l’approchant qu’on se rend compte de sa majesté, lui qui trône au milieu d’un immense domaine forestier destiné à la chasse. Mais revenons au château et à quelques-unes unes de ses merveilles. Et tout particulièrement, le majestueux escalier en double révolution situé au centre du donjon (pour les ignares : cet escalier comporte en fait deux séries de marches qui ne se croisent jamais ; Très surprenant !!). L’autre merveille, à mon sens, se situe au sommet e l’édifice : les terrasses qui sont presque plus décorées que les façades ; ce n’est que profusion de sculptures, de cheminées, etc, etc, ... ; sans oublier une magnifique vue sur le domaine. Ma déception a été grande quant au mobilier : hormis le premier étage qui est meublé, les reste des étages est bien vide ....... enfin pas longtemps : si vous oubliez de venir tôt (avant 10h), c’est la foule et le bruit assuré. Comptez au moins deux bonnes heures pour en profiter.
Direction la seconde halte de la journée : Blois et son château royal. Ce château est installé au milieu de la ville si bien qu’on ne le découvre qu’au dernier moment. Il a la particularité d’avoir conservé quatre époques dans son architecture. La plus ancienne, la médiévale, n’a résisté qu’au travers de la salle des états. Vient ensuite l’aile Louis XII par laquelle on entre. Elle se distingue par le mélange du rouge de la brique et du blanc de la pierre de tuffeau : pour les experts, c’est du gothique flamboyant. L’aile François 1er, de style Renaissance bien sûr, me paraît être le joyau de ce château de par la richesse des décors de la façade sans oublier le magnifique escalier à vis, ajouré. Enfin, la dernière aile, de style classique, commandée mais jamais terminée par manque de finances par Gaston d’Orléans, le frère banni de Louis XIII. Une visite guidée très intéressante permet de se remémorer l’histoire de France du 15ème au 17ème siècle.
Direction le gîte ! Au passage, en longeant la Loire, on découvre de très beaux points de vue sur les châteaux de Chaumont et d’Amboise, pour les plus connus. Mais après Tours, on en rencontre de moins connus comme celui de Luynes, voire celui de Langeais qui serait un des mieux meublés du Val de Loire. Voilà une journée bien remplie qui se termine.
Deuxième jour et deuxième étape du périple : même route que la veille mais on s’arrête à Amboise, avec un beau soleil sous un ciel bleu en prime. Là, on est accueilli par le château qui surplombe la Loire et la ville. Mais, si nous sommes à Amboise, c’est surtout pour voir la dernière demeure de Léonard de Vinci (enfin, c’est mon choix !!). C’est au Clos-Lucé, un magnifique manoir en briques rouges chaînées de pierre au milieu d’un agréable par, que François 1er l’avait installé. On y découvre les pièces, très bien meublées, où il a fini ses jours. Au sous-sol sont présentées un certain nombre de maquettes réalisées à partir des manuscrits du génie : c’est là qu’on se rend compte qu’il fut un génial visionnaire (l’avion, le char blindé, l’automobile, et j’en oublie ; tout ça il y avait pensé, 400 ans avant !!). Profitez du parc : par temps chaud, il fournit un semblant de fraîcheur rassérénant.
Direction Chenonceaux plus connu sous le nom de château des dames. Au passage, ceux qui sont prêts à se faire arnaquer iront admirer la Pagode de Chanteloup pour la modique somme de 6€ (tout ça pour voir une simple tour en forme de pagode !! Non merci). Par contre, ne manquez pas, sur la route, le point de vue sur le château d’Amboise, sur votre gauche. A Chenonceaux, tout est très bien organisé. Un grand parking avec un gardien pour faire la circulation vous attend. Avant de découvrir le château en lui-même, on traverse un bois qui nous mène jusqu’au jardin de Diane de Poitiers. Voilà enfin le château, enjambant, tel un pont, le Cher : c’est vraiment très original. L’intérieur du château possède un très bel ameublement qui le rend plus vivant. A l’étage, on a un très beau point de vue sur les deux jardins ainsi que sur le parc. On aperçoit aussi la ferme reconstituée du 16ème siècle derrière laquelle se cache un très grand jardin où se mêlent fleurs, légumes, arbres fruitiers miniatures,...
Pour changer d’itinéraire, le chemin du retour se fait par Loches. Au passage, on change encore de rivière : Loches se situe sur les bords de l’Indre. Là, on découvre un tout autre style d’architecture. Fini les châteaux Renaissance ! Place à une cité médiévale enserrée dans de hautes murailles percées d’une seule ouverture, la porte Royale. Après l’avoir franchie, on découvre le Logis Royal, la partie la plus belle de la citadelle, puisque destiné à héberger le roi. Contrairement au donjon, un des plus hauts de France, situé à l’autre extrémité de la citadelle : un énorme bloc de pierres très imposant qui devait effrayer les assaillants de l’époque. Au milieu de la citadelle, on remarque une église au toit bien étrange avec un toit formé de quatre pyramides creuses : la collégiale Saint Ours.
Dernière halte de la journée, le château d’Azay le Rideau. Une petite demeure de notable, le trésorier de France de l’époque, sise au beau milieu du village mais à l’intérieur duquel on semble se trouver en pleine campagne. Ce château en forme de L est posé au milieu de l’eau. Ici, l’eau de l’Indre a été détournée pour servir de miroir à cette somptueuse bâtisse rassemblant à la fois l’architecture militaire (pour rappeler le rang de son propriétaire) et des influences italiennes. On ne pourra pas rater son escalier d’honneur richement décoré et ouvert sur la cour.
Retour au gîte pour une bonne nuit de repos avant d’affronter la dernière journée. Heureuse surprise à mon arrivée à Bréhémont. Ce soir, c’est fête. Dans le cadre des Jours de Loire, il y a un « défilé » d’embarcations typiques (gabarre, ...) avant d’assister à un feu d’artifice tiré sur le fleuve et un feu de la Saint Jean au milieu de l’eau : une soirée très sympa !
Dès le lever, direction Ussé, tout près de Bréhémont. Je n’ai fait qu’y passer sans le visiter. Mais il possède un grand parc avec des jardins. Son architecture mélange, là aussi, les tours médiévales avec la décoration et les aménagements de style Renaissance. A l’entrée du parc, on aperçoit même une chapelle que certains voudraient bien comme église.
Direction ensuite la fameuse abbaye royale de Fontevraud. Mais au passage, n’hésitez pas à faire une halte à Candes Saint Martin. Ce petit village tout en pierre abrite une belle collégiale en son cœur. Et sur les hauteurs du village, un beau point de vue vous permet de voir la confluence de la Vienne et de la Loire sous le village. Malheureusement, la vue est quelque peu gâchée par la « somptueuse » centrale nucléaire de Chinon. A ce propos, les générations se succèdent mais ne se ressemblent pas : les rois nous ont laissé de magnifiques demeures dans ce Val de Loire ; nous, nous laisserons, au même endroit, deux centrales nucléaires !! BRAVO. Fontevraud, abbaye royale financée par les rois de France et les Plantagenêts (Aliénor d’Aquitaine et Richard Cœur de Lion y reposèrent). Cette abbaye eut la particularité d’abriter un ordre mixte, surtout réservé aux aristocrates et dirigé par une abbesse. Au temps de sa splendeur, cette abbaye fut l’ensemble monastique le plus vaste de France, puisqu’elle abritait cinq prieurés. Trois d’entre eux ont été conservés pour le plus grand plaisir de nos yeux. Tout particulièrement, la très vaste et très lumineuse église abbatiale ainsi que le cloître du Grand-Moûtier.
La suite se déroule à Chinon, sur les bords de la Vienne. Cette fois-ci, ce sont des ruines d’une vieille citadelle médiévale qui nous attendent. C’est dans ces murs que Jeanne d’Arc reconnut le Dauphin (le futur Charles VII) parmi la foule des convives. Un musée lui est d’ailleurs consacré dans la Tour de l’Horloge. A réserver aux amateurs de vieilles pierres. Ici pas de meubles ni de tapisseries mais plutôt des ruines, même si certaines sont très bien conservées.
Direction enfin la dernière étape du week-end : le château des jardins. Je veux parler de Villandry. Celui-ci fut bâti par le ministre des finances de François 1er qui rasa la forteresse médiévale, ne conservant que le donjon pour rebâtir une demeure Renaissance. Elle fut ensuite réaménagée dans le style XVIIIème : c’est ainsi qu’il nous est parvenu, magnifiquement meublé et entretenu. Mais le clou de cette demeure se trouve à l’extérieur. Au début du XXème siècle, le propriétaire décida de créer des jardins tels qu’ils pouvaient exister à la Renaissance. Et le résultat est magnifique : on l’apprécie d’autant mieux du sommet du donjon. De là haut, on peut voir le jardin potager, composé de neuf carrés plantés de légumes dessinant des formes géométriques, le jardin d’ornement constitué de haies de buis (on peut voir des représentations de l’amour à base de cœurs, les croix de Malte, du Languedoc et du Pays Basque ; ainsi que des instruments de musique), le jardin d’eau, tout simple, constitué d’un bassin ceint d’un cloître de verdure ; enfin, le jardin des simples qui regroupe les herbes aromatiques et médicinales.
Voilà, toutes les bonnes choses ont une fin. Il est temps de rentrer. Cette région est vraiment très riche pour le touriste : on comprend mieux pourquoi de nombreux rois y ont séjourné. Dommage pourtant que les tarifs de ces châteaux soient si élevés : difficile de tout voir quand on part en famille, à 6-7€ de moyenne par entrée.