Arlington, la mémoire éternelle

Publié le par Jérôme Voyageur

Arlington, la mémoire éternelle

Washington D.C., 30 Avril 2016

J'ai décidé de placer ce samedi sous le signe de la mémoire. Direction l'état voisin de la Virginie pour commencer la journée. Pas bien loin en fait, juste de l'autre côté du Potomac. Pour ceux qui logeraient près de la rivière, on peut envisager de s'y rendre à pied; Sinon, le plus pratique consiste à emprunter la ligne Bleue qui dispose d'une station en bordure du cimetière national d'Arlington, un des plus anciens des Etats-Unis, et sans aucun doute le plus connu.

J'ai eu l'occasion d'en visiter deux en France, celui de Colleville-sur-Mer, au-dessus de Omaha Beach, et celui de Saint-James à quelques kilomètres du Mont Saint-Michel. L'un comme l'autre sont des endroits impressionnants, lieux de calme, de propreté, de perfection. Tout ceci m'incitait à découvrir "la maison-mère". Combien de fois on a pu en apercevoir des petites scènes dans les films d'Hollywood. Cette fois, c'est pour de vrai. Contrairement à ceux de France, Arlington accueille les sépultures de soldats (et aussi quelques civils) depuis la guerre d'indépendance jusqu’aux conflits récents comme l’Afghanistan. Il se trouve qu'il s'agissait de la propriété de la femme du général Lee, le chef confédéré ... On peut d'ailleurs y voir sur un des points haut la Arlington House qui leur servait de résidence avant la guerre de Sécession. Dès le conflit, le domaine est transformé en nécropole nationale.

Remonté de la station de métro, on se retrouve au bord de la large avenue qui se termine devant le mémorial aux femmes. Il faut parcourir quelques dizaines de mètres avant de voir apparaitre sur la gauche un passage et un bâtiment derrière les haies. C'est le centre des visiteurs qui se dresse là. Un rapide passage à l'intérieur suffit pour récupérer un plan quasi indispensable pour se repérer dans les 170 hectares du cimetière. A l'arrière du bâtiment, les trottoirs servent de quais pour embarquer dans les petits trains qui conduisent les visiteurs directement vers les quelques points majeurs. Sauf à être vraiment très fatigués, il est tout de même préférable de découvrir à pied, pour profiter à fond, s'arrêter où on veut, aller explorer une section particulière pour découvrir la tombe d'un soldat célèbre ....

Je découvre rapidement que le cimetière d'Arlington est tout sauf une immense étendue plane, ce serait plutôt des creux et des bosses au milieu desquelles ressortent deux collines qui surplombent l'ensemble du site. De nombreux arbres couvrent les lieux ce qui renforce encore plus le côté calme d'une nature paisible. Rapidement, on longe les premières sections. Je retrouve ici les alignements parfaits de pierres tombales blanches et rectangulaires. Quel que soit l'angle sous lequel on regarde, on trouve toujours un alignement, c'est étonnant.

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Tombe de JFK
Tombe de JFK

Si tous les chemins mènent à Rome, il n'en est pas forcément de même à Arlington. Il est bien utile de jeter un oeil au plan fourni à l'entrée pour être certain d'atteindre le premier but de la visite à savoir le carré des Kennedy. Celui-ci est implanté sur un flanc de la première colline. Quatre plaques noires sont posées sur un pavement de pierres brutes, du granit de Cape Code, tandis qu'une flamme éternelle brûle en arrière-plan. Ici sont enterrés l'ancien président John Fitzgerald tragiquement assassiné en 1963 à Dallas, sa femme la très belle Jacqueline Bouvier ainsi que deux de leurs enfants, l'une mort-née, l'autre décédé à l'âge de deux jours à peine. Étonnamment, tout le monde respecte le silence dans ce coin. Même cinquante après, JFK impressionne encore, les jeunes y compris. En se retournant vers la ville, au bas d'une courte volée de marches, un parvis elliptique bordé d'un muret gravé avec des extrait de discours, offre un premier point de vue sur la ville. D'ici apparaissent surtout le mémorial Washington et le Capitole qui dépassent au-dessus des arbres. En rebroussant chemin jusqu'à l'allée qui continue de contourner la colline sur laquelle de dresse l'Arlington House, aussi appelée Custis-Lee Mansion, je découvre coup sur coup deux petites croix blanches plantées dans la pelouse, non loin de l'allée, chacune accompagnée d'une plaque tout aussi blanche, puis une pierre tombale gravée. Il s'agit des tombes des frères du président, Robert Kennedy, ancien ministre, lui aussi assassiné, Ted Kennedy ancien sénateur, et Joseph junior décédé pendant la seconde guerre mondiale (étudiant brillant, c'est lui qui était destiné à devenir un jour président).

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Arlington House
Arlington House

Je contourne ensuite cette colline jusqu'à trouver un escalier qui permet de s'en approcher, du moins de rejoindre le chemin de terre qui dessert le sommet. Depuis quelques minutes déjà, un gros changement s'est opéré dans les sections qu'on pourrait qualifier de centrales. Ici chacun semble avoir choisi le style et la couleur de sa pierre tombale. Si cela ressemble plu à une cimetière classique, cela perd aussi en sensation de perfection. La Custis-Lee qui servait donc de résidence au futur chef confédéré avant la guerre de Sécession fait aujourd'hui office de petit musée en son honneur. La maison en bois présente deux étonnantes colonnes face à la ville. Pour une raison que j'ignore, le drapeau est en berne sur ce mât. Quant à l'unique tombe installée juste devant la maison, y compris en contrebas, je découvre qu'elle appartient à Pierre Charles L'Enfant. Ce nom français occupe une grand place dans l’histoire de Washington. Arrivé avec Lafayette, il resta sur place et finir par devenir l'architecte de la capitale qu'on appelait alors seulement Federal City. A défaut d'avoir vu les travaux, ses plans servirent de manière posthume pour aménager tout le centre. Son importance est telle qu'il fut un des rares personnages dont la dépouille a été exposée sous la rotonde du Capitole (en 1909, soit 84 ans après son décès dans la misère) avant son transfert à Arlington. De ce son catafalque qui ressemble à une table de pierre, il peut désormais admirer son oeuvre pour l'éternité. D'ici on distingue de nouveaux bâtiments : un bout du Pentagone sur la droite entre les arbres, et droit devant le mémorial Lincoln, et plus loin celui de Jefferson.

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En mémoire de la 3ème Division
En mémoire de la 3ème Division

Pour rejoindre la colline suivante qui constitue le point culminant ainsi qu'un de lieux les plus importants du cimetière, il faut rebrousser chemin et sinuer au gré des chemins, monter et descendre au gré du relief. On arrive ainsi près d'un lieu qui se révèle d'abord bruyant du fait des nombreux bus qui laissent tourner leurs moteurs. Plutôt que de rejoindre le bâtiment blanc qui se révèle sur ma gauche, je préfère rejoindre la pelouse à l'arrière. Trois plaques métalliques collées sur des stèles blanches ont attiré mon attention. Deux d'entre elles rappellent la perte des deux navettes spatiales et leurs équipages, Challenger et Columbia. La troisième rappelle le sacrifice de l'équipe de sauvetage de l'ambassade américaine à Téhéran en 1979. Sur le tertre voisin se dresse un mât assez peu esthétique : c'est le mémorial du cuirassé USS Maine.

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Amphithéâtre
Amphithéâtre

Retour à la construction blanche que je découvre être un amphithéâtre à ciel ouvert, cerné d'une colonnade, le tout en marbre blanc du Vermont. Cette enceinte accueille les cérémonies funéraires en plus que de quelques évènements annuels. En contournant le bâtiment, initialement pour aller juger du point de vue, je débarque totalement par hasard sur la cérémonie de la relève de la garde, ce qui explique la densité soudaine de la foule. Cette garde assure la protection du soldat inconnu. On devrait pourtant parler des soldats inconnus, puisqu'il y a une dépouille anonyme par conflit majeur auquel les Etats-Unis ont participé. La relève suit un protocole très martial. Mieux vaut ne pas se frotter à la Marine qui la commande. J'assiste ensuite à une série de dépôt de gerbes officiels. Après le premier, j'essaie de fendre la foule pour m'extirper de cette masse pour continuer ma visite en contrebas. Des travaux sur le chemin me conduisent à suivre le couple devant dans les pelouses à travers les tombes, tout en essayant de les contourner pour respecter les lieux.

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L'amphithéâtre et la tombe du soldat inconnu
L'amphithéâtre et la tombe du soldat inconnu

Je rejoins ainsi un étonnant porte rouge, la McMellan Gate, plantée un peu au milieu de nulle part avant de bifurquer vers le mémorial des femmes, avant de pénétrer à nouveau dans le cimetière dans des sections un peu plus excentrées et moins visitées. Un peu avant d'atteindre l'accès nord, j'aperçois des tombes récentes de soldats tombés en Afghanistan il y a deux ans à peine.

Si Arlington est un lieu de mémoire, ce n'est pas un lieu figé : c'est un cimetière qui accueille régulièrement de nouveaux héros.

Grâce au plan il sensé être possible de retrouver les stèle des plus connus d'entre eux, mais c'est loind'être aussi facile que de trouver le carré des Kennedy. Parmi ces tombes plus ou moins connues, on peut citer :

- Robert Chaffee et Virgil Gus Grissom décédés dans l'incendie de leur capsule Apollo 1

- le général Marshall qui imagina le plan d'aide à l'Europe après la seconde guerre mondiale

- Robert Peary, fameux explorateur polaire dans l'Arctique, premier à rejoindre le pôle Nord

- John Basilone, héros de Guadalcanal, titulaire de la médaille d'honneur du congrès, et rendu célèbre par la série Pacific

- "Pappy" Boyington, as de l'aviation américaine, immortalisé par la vieille série "Les têtes brûlées".

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