Itinéraire bucolique entre terre et mer (1)
Samedi 15 Octobre 2016, Paris
Jamais je crois je n’ai été aussi détaché avant de partir. Je n’ai toujours pas l’impression que je pars en vacances. Je n’en suis pourtant pas blasé, loin de là.
Le temps s’est heureusement remis au beau ce qui me permet de rejoindre la gare RER tranquillement. Je suis halluciné de trouver autant de monde dans la rame un samedi vers quinze heures. On se croirait aux heures de pointe en semaine. Obligé de rester debout et tassé jusqu’à la gare du Nord. En cet après-midi de début de week-end, le terminal 2F est très clairsemé. Sa traversée est d’autant plus rapide. La dépose-bagages ne nécessite qu’une poignée de minutes, tout comme le contrôle de sécurité.
Le premier tronçon se déroule à l’heure. A peine quarante cinq minutes de vol pour trente de roulage (quinze à Roissy, quinze à Amsterdam). Cela vaudrait presque la peine d’y aller par la route … Le survol des Pays-Bas est étonnant : j’ai parfois l’impression qu’il y a plus d’eau que de terres émergées. A peine atterri en terre batave commence un long roulage : il faut bien longtemps pour rejoindre l’aérogare. Amsterdam Schipol ressemble à une immense pieuvre dont les longs tentacules seraient autant de halls. Autant dire que le trajet jusqu’aux vols internationaux de KLM est sportif. Le seul obstacle est le contrôle des passeports réalisé par une portique automatique déclenché par le scan du passeport, encore plus rapide que notre système Parafe mais moins sécurisé.
Notre Boeing 777 nous attend à l’extrémité du hall F. En chemin, je me fais sauter dessus par la chienne des douanes. Elle détecte l’argent que je porte sur moi, étonnant … C’est là que les choses commencent à se compliquer. Au moment de l’embarquement e la business et des billets prioritaires, l’équipage découvre un problème de sièges. L’embarquement est immédiatement stoppé ; nous voyons même certaines personnes débarquer. C’est l’hallucination, d’autant plus que les informations ont parcellaires pour ne pas dire inexistantes. Il semblerait que les six premiers rangs de la classe économique doivent être changés. Les délais sont inconnus et imprévisibles. Les minutes passent, puis une heure. Etonnamment, personne ne proteste… Au moins cela laisse le temps d’embarquer tous les bagages, moi qui avait quelques craintes pour le mien. C’est avec presque deux heures de retard que nous décollons enfin en direction de l’Asie. Et pas un effort pour tenter de résorber une partie du retard.
Douze longues heures sont nécessaires pour rejoindre dans un premier temps la cité-état qu’est Singapour. Je me surprends à dormir assez bien pendant le vol et somnoler malgré le confort limité. Par conséquence, le trajet est moins pénible que je ne le craignais. Vers minuit trente, après le repas, j’ai la surprise de voir une hôtesse m’offrir un verre de champagne pour fêter mon anniversaire. Arrivés à Singapour, nous devons tous débarquer pour rejoindre immédiatement la salle d’embarquement voisine. Il faut néanmoins repasser un contrôle de sécurité quelques pas après la sortie de l’appareil. Etonnant ! Il faut moins d’une heure avant de rembarquer à bord avec un nouvel équipage et certains nouveaux voisins. C’est reparti pour deux heures et demie jusqu’à Denpasar, l’aéroport international de Bali.
Quel immense bâtiment comparé à la taille de l’île ! A se demander à quoi servent de si grandes salles. Avec l’exemption de visa dont bénéficient entre autres les français, le passage de l’immigration est rapide. Miracle, mon sac est là. Je peux rejoindre le chauffeur qui attend depuis près de deux heures. Sa fonction se clarifie lorsqu’il me tend son téléphone et que j’entends parler français, le guide, resté à l’hôtel. Le premier contact balinais est chaud, moite, nocturne, et bruyant. La circulation est bien dense malgré l’heure. Quelques dizaines de minutes sont nécessaires pour rejoindre l’hôtel où m’accueille Dondy qui va nous guider pendant les deux prochaines semaines. Je peux enfin me poser, me doucher et remettre les affaires en ordre entre les sacs, le tout au frais de la climatisation poussée à fond. Demain commence vraiment les vacances et le dépaysement.
Lundi 17 Octobre, Seminyak
Réveillé bien avant l’heure sous l’effet du décalage horaire, je traine tout de même au lit jusqu’à sept heures et demi. Direction le bord de la piscine pour prendre le petit déjeuner. J’y retrouve Dondy, puis les autres membres du groupe, d’abord Chantal et Adrian, de Suisse, puis les sœurs Danièle et Nicole Vers neuf heures nous sommes rejoints par notre chauffeur. On le laisse charger avant d’embarquer, au large dans ce grand minibus.
Il faut de longues minutes pour s’extirper de ce magma de circulation bien dense, mélange d’automobiles et d’innombrables scooters. Trois bons quarts d’heure sont nécessaires pour rejoindre le complexe religieux d’influence hindouiste de Tanah lot : péage d’accès, parkings en tous genres, échoppes touristiques… Et rapidement la foule. Nous sommes nombreux à promener sur le front de mer face à l’océan Indien. Il faut reconnaitre que les lieux sont particulièrement photogéniques, de jour comme de nuit si j’en crois certains guides et cartes postales. Divers temples se dressent sur le les pointes rocheuses tandis que les flots viennent claquer dans de belles gerbes d’eau. Tanah Lot, temple de la mer, porte bien son nom. Le monument le plus important est cet îlot accueillant un temple désormais totalement détaché de Bali. Seule la marée basse permet encore d’y accéder à pied. On raconte que sa fondation remonte au quinzième siècle lorsque le prêtre Nirartha aurait découvert l’endroit et décidé de s’y installer avant de faire construire le sanctuaire dédié au dieu de la mer.
Après cette mise en bouche religieuse, nous poursuivons vers le nord-ouest jusqu’à Bajera où nous faisons du change avant de nous enfoncer dans le marché pour dénicher un sarong, indispensable pour toutes les parties sacrées des temples hindouistes. Que l’achat est bien long pour quatre simples sarongs …. Nous reprenons la route en bifurquant vers les pentes du volcan Batukaru, laissant derrière nous les plages. Le paysage urbain a enfin laissé place à la verdure des rizières, des palmiers et des bananiers qui assurent les bordures des plantations. Nous montons ainsi vers le village de Belimbing. Nous faisons halte dans un petit restaurant, ici appelé « warung » dont la terrasse propose un joli point de vue sur les rizières en contrebas. Notre premier repas local est magnifié par la vue. Premiers « goreng » d’une longue liste …
Le ventre plein et bourrés d’énergie, nous nous préparons à la marche. Notre guide local nous attend quelques kilomètres plus loin, dans le village. C’est là que nous mettons pied à terre et sac au dos. Nous voici partis pour deux heures de déambulation au milieu des rizières, à sinuer sur les étroits murets de terre, parfois gorgés d’eau et totalement mous. A savoir qui finira la journée sans avoir les chaussures enduites de boue. Au bilan, plus de la moitié du groupe finira par s’enfoncer. A tel point que notre guide local finit carrément par marcher dans un canal pour nettoyer ses pieds. D’ailleurs il y a même un torrent à franchir à gué en bordure des plantations. Au-delà des cultures de riz qui prennent une place importante, nous apercevons différentes autres cultures telles que les caféiers, toujours à l’ombre d’une espèce plus grande, les bananiers, les muscadiers, mais aussi des girofliers. Ceci explique les senteurs par endroits, quand les clous sont mis à sécher au sol dans les cours des habitations. Mais quelle suée ! Si seulement ces rizières étaient planes ! Mais non, au contraire, la plupart sont implantées en terrasses. Autant dire que notre promenade n’est qu’une succession de montées et de descentes. La fin du parcours abandonne les espaces ouverts plantés de riz pour les sous-bois. Soudain, au cœur d’une clairière, nous apercevons un temple, dit Mekori. Il semble un peu abandonné en pleine nature, bien patiné par le temps et les mousses qui recouvrent les murs et les sols. Pourtant la présence d’offrandes et d’étoffes autour des statues prouvent le contraire. Dondy nous donne notre première leçon d’hindouisme et d’organisation des temples. C’est assez différent de ce qu’on peut voir pour d’autres religions : un enclos et, non pas des statues mais soit des sortes de trônes géants soit de grandes structures à multiples toits. C’est aussi la première occasion de mettre nos sarongs et, surtout d’essayer de les faire tenir ; Ce n’est pas encore gagné ! Il va nous falloir quelques temples avant d’être au point. Dans un coin de l’enclos, nous distinguons deux singes plutôt craintifs qui filent dans les arbres dès que nous approchons de leur mur.
En quittant le temple, nous réalisons que nous étions non loin du village puisqu’il ne faut que quelques minutes avant de déboucher sur la route. Quelques centaines de bitume plus loin, nous rejoignons notre véhicule. Direction l’hôtel Kebun Villas, situé un peu plus bas dans la vallée. Nous sommes accueillis dans un véritable musée, tant il y a d’objets hétéroclites accumulés dans le grand hall. La vue depuis la terrasse est superbe : on aperçoit au loin l’océan. En revanche toutes les chambres sont en contrebas : dernier effort pour descendre jusque là. Et plus encore pour explorer les lieux jusqu’au bas de la pente, où se trouvent une piscine (découverte trop tard pour en profiter) et un mini-golf. Le moindre déplacement est pentu. Autant s’installer en terrasse en attendant le repas. Et quoi de mieux que des bières locales pour patienter tout en se désaltérant.