En mémoire des GIs du front de l'Est
Lundi 22 Mai 2017, Saint-Avold
Après une matinée consacrée à une découverte, en l'occurrence la ligne Maginot aquatique, je poursuis ma route jusqu'à la ville de Saint-Avold. Celle-ci m'intéresse tout particulièrement pour son cimetière américain. J'en ai déjà vu un certain nombre en France et aux Etats-Unis, c'est toujours impressionnant. Celui-ci présente la particularité d'être le plus grand en Europe pour la seconde guerre mondiale. C'est-à-dire plus important que celui de Colleville-sur-Mer, pourtant déjà très marquant en surplomb de la sanglante plage d'Omaha.
Il est pourtant malaisé d'y parvenir. Autant le fléchage est précis et bien présent en centre-ville, autant il disparait complètement dès qu'on s'en éloigne, traversant une zone commerciale. C'est un peu au hasard que je choisis de poursuivre tout droit à l'abord de cet énième rond-point. Bonne idée : l'entrée de la nécropole apparait soudain sur la droite, sans la moindre annonce. Une fois la grille passée, je ressens immédiatement ce sentiment de quiétude spécifique à ces lieux. L'allée pavée et arborée conduit jusqu'à la traditionnelle maisonnette qui sert d'accueil à chacun de ces cimetières. Aujourd'hui l'endroit semble désert. Un seul autre véhicule est stationné là. Je vais d'ailleurs retrouver ce couple un peu plus loin dans la nécropole.
Seul un bloc massif dépasse des hautes haies. Les allées piétonnes conduisent au pied de cet imposant bâtiment en pierres de tailles, tout de même percée d'une haute baie vitrée dans sa partie arrière ce qui permet d'éclairer naturellement l'intérieur. Cette austère construction est le mémorial consacré aux opérations américaines dans la région. On y retrouve les immenses cartes gravées dans les parois latérales et figurant le théâtre des opérations. Juste au-dessus sont fichés les drapeaux des unités impliquées. Mais le plus surprenant vient du mur du fond, derrière le semblant d'autel. Cinq statues ont été plaquées sur le mur. Le personnage central pourrait laisser penser à un Christ, surtout dans une chapelle, sauf que sans croix et avec un corps d'athlète musculeux,il s'agit là du guerrier Vaillant symbolisant la Liberté. Dans la même logique les quatre autres personnages n'ont rien à avoir avec de quelconques apôtres : à gauche le roi David et l'empereur Constantin, à droite Georges Washington et le roi Arthur. Quelle surprenante assemblée pour veiller sur les âmes de ces valeureux soldats.
En ressortant du bâtiment, on se trouve au beau milieu d'une longue terrasse : face au visiteur les 10489 tombes apparaissent, réparties sur neuf sections s'étalant sur près de quarante six hectares. De part et d'autre, deux murs bordent les épaisses haies, chacun veillé par un mat arborant la bannière étoilée : on peut y voir inscrit le nom des disparus. Les pelouses qu'elles servent de lieu de sépulture ou non sont parfaitement tondues et présentent une belle couleur verte et uniforme. Au pied des quelques marches, on peut alors emprunter les larges allées qui traversent le cimetière. C'est en approchant ainsi qu'on découvre certains croix de forme différente: celles des soldats de religion juive. Bien que ce ne soit pas ma première visite dans un tel endroit, je reste à chaque fois émerveillé par les alignements. Quel que soit l'axe du regard, les différents croix forment systématiquement de parfaits alignements. Cela parait presque impossible. A l'opposé du mémorial on aperçoit le belvédère sur lequel a été gravé un énorme aigle, symbole des Etats-Unis. Entre les deux, on remarque la présence de larges bandes herbacées laissées vides à l'exception de la grande section ovale au centre de la nécropole. Après avoir cheminé un moment au coeur du cimetière, le soleil pesant et la rareté des arbres m'incitent à retourner vers la sortie. Encore un endroit de mémoire qui rappelle le sacrifice des soldats américains pour nous. Quels que soient les évènements du quotidien entre nos deux pays, une telle visite témoigne s'il en était encore besoin que nos liens sont bien plus forts que l'on croit.