Reco Tanganyika (1)
Dimanche 3 Septembre 2017, Paris
Enfin le départ. C’est parti pour un long périple qui commence par une heure de RER, heureusement bien vide en ce dimanche après-midi. Avec deux heures trente d’avance j’ai le temps de récupérer mon ticket bagage, déposer mon sac et passer le contrôle de sécurité sans encombre. Après un tour du terminal 2F toujours aussi fréquenté, agoraphobes s’abstenir, je finis par apercevoir Rebecca et Isabelle déjà installée près de la porte d’embarquement. Bruno nous rejoint une demi-heure plus tard. C’est une autre demi-heure, de retard celle-ci, qui se rajoute à notre horaire de départ. C’est décidément devenu une mauvaise habitude d’Air France dans ce terminal. Heureusement que nous avions pris des marges pour notre escale. C’est finalement avec une quarantaine de minutes de délai que nous décollons enfin vers Amsterdam Schipol. Yves et Christian nous y ont devancés en provenance de Lyon. Après les formalités de sécurité et d’immigration, nous devons encore patienter une bonne heure avant de repartir vers Nairobi.
Lundi 4 Septembre 2017, Nairobi
La nuit fut courte et pas super reposante. Cinq heures d’attente nous séparent du dernier vol. Heureusement que la nouvelle aérogare est légèrement plus accueillante que celle qui a brûlé, en tout cas un peu plus d’espace et de lumière mais toujours aussi peu de sièges pour s’asseoir. Mais une telle attente reste longue, surtout que la salle d’embarquement n’est annoncée qu’au bout de deux heures. Contraints de rester dans le couloir principal non loin des écrans. Notre salle se situe finalement au rez-de chaussée et se révèle spacieuse : c’est l’occasion pour nous d’observer le manège chaotique du chargement des bagages dans l’avion situé à quelques mètres de nous. Edifiant et inquiétant ! On s’étonne moins des pertes de certains sacs après avoir vu cela.
Finalement, avec un certain retard, nous montons dans un bus qui nous fait faire le tour du tarmac avant de nous déposer au pied de notre Embraer 190. Mais il faut encore faire un détour par Nampula au Mozambique, lieu de scènes ahurissantes où certains se retrouvent à plusieurs sur le même siège, qu’autres qui veulent garder leurs sacs devant les issues de secours et ceux qui veulent descendre alors qu’ils vont au Malawi. Et un soupçon de retard en plus … Isabelle profite de cette escale pour prévenir Fred notre heure approximative d’arrivée. A défaut d’être le chemin le plus court, ce vol permet de profiter du relief très particulier de cette partie du Mozambique, succession d’inselbergs au beau milieu de nulle part. Bon gré malgré nous finissons par atteindre Lilongwe, notre destination, avec une bonne heure de retard. Et enfin, nous sommes efficaces. En pressant le pas sur le tarmac, nous débarquons les premiers dans le hall pour faire nos demandes de visas. L’agent y met du sien en proposant de faire un seul reçu pour quatre, ce qui réduit le temps de traitement. Nous passons ensuite en priorité au contrôle d’immigration malgré la présence de dizaine de personnes dans la file voisine. Et enfin, nos bagages arrivent au moment où nous rejoignons le tapis roulant. Il ne reste qu’à feinter les agents chargés de fouiller les sacs à la sortie histoire qu’ils ne découvrent pas les quantités de victuailles dissimulées dans nos sacs. Nous embrouillons en expliquant que nous sommes tous ensembles et que les vérifications des deux premiers sacs suffisent. Et ça marche ! Nous n’allions pas laisser pâtés, saucissons, fromages et chocolat … Nous retrouvons Fred et Inno sur le parking. Il ne reste qu’à rejoindre le centre de la capitale, trajet plus long que dans mon souvenir du fait d’embouteillages croissants ici aussi. Retour au Kiboko Hotel quelques années après. Rien n’a changé. Mais la journée commence à peser : les lits nous tendent les bras. D’ailleurs, en m’étendant pour me reposer dans l'attente du repas, je suis à deux doigts de sombrer et de commencer ma nuit. Nous descendons au restaurant installé au rez-de-chaussée où nous dégustons un délicieux repas que Fred a pris soin de réserver à l’avance histoire de ne pas attendre des heures le service. Nous ne trainons pas longtemps à table, les paupières commençant à peser.
Mardi 5 Septembre, Lilongwe
Nous reprenons les bonnes habitudes. Tout le monde devance l’appel pour le petit-déjeuner. A sept heures nous sommes prêts à partir direction le nord du pays. La circulation est plus dense en ville. Dès la sortie, elle laisse place à de nombreuses zones de culture. Les gens sont toujours aussi nombreux au bord des routes, une constante au Malawi. Les barrages de police sont toujours aussi nombreux mais nous passons sans encombre. Il faut dire que Fred les prend au souffle à chaque fois, si bien qu’ils n’arrivent pas à en placer une. La route s’élève progressivement, le paysage faisant d’abord place à divers "pains de sucre" granitiques avant que nous rejoignons les plantations de résineux à une altitude proche des deux milles mètres. Puis c’est la descente vers Mzuzu qui grandit elle aussi. Je reconnais néanmoins le fameux marché. Nous nous arrêtons juste pour faire le plein d'essence avant de continuer notre progression vers le nord. La route se fait plus tortueuse et escarpée. Nous passons devant quelques mines de charbon qui saturent l’air environnant d’une épaisse poussière noire.
Et puis, au hasard d’un énième virage, nous retrouvons les eaux du lac Malawi. Il faut encore subir une série de lacets sur une route bien dégradée avant d’atteindre la rive. Nous la longeons une grosse demi-heure avant de bifurquer vers une piste, dans un premier temps loupée sur notre élan, direction Sangilo. Un accès nécessitant absolument un véhicule tout-terrain pour rejoindre ce campement en surplomb du lac Malawi. Une fois les tentes montées, nous, les quatre garçons, descendons direct à la plage pour profiter d’une baignade bien agréable. Avec le repas, nous reprenons les bonnes habitudes de la soupe quotidienne (« parce qu’il faut boire ! »), et des légumes africains, en l’occurrence des gemsquash. Première nuit bercée par la brise du Mozambique voisin et du bruit des vagues.
Mercredi 6 Septembre, Sangilo
Nous terminons le petit-déjeuner à l’heure où nous aurions dû le commencer. Tout le monde s’est réveillé en avance. Bien réveillés ? Pas sûr ! Fred nous tente un démarrage en côte en troisième et sans les quatre roues motrices. Cela dure dix mètres avant de repartir en arrière sous le poids du véhicule. Il nous faut une grosse heure pour parcourir la route qui mène à la frontière tanzanienne. En cette saison, les rizières sont transformées en cultures plus classiques. Nous quittons aussi le lac Malawi.
Une heure trente est nécessaire pour franchir les deux postes frontière. Si la sortie ne prend qu’un quart d’heure, il en va différemment pour l’entrée en Tanzanie, surtout pour le transit des véhicules. Et encore les procédures sont optimisées. Par la même occasion, nous avons changé d’heure. Si bien que, quelques kilomètres plus loin, nous stoppons au fond d’une plantation de thé pour le pique-nique. Le même lieu qu’il y a neuf ans ! Etonnamment le temps est couvert et doux. La suite de la lente descente vers Mbeya, capitale régionale, est un vrai marché aux fruits et légumes. Ici nous prenons ananas, avocats et fruits de la passion, ailleurs, bananes, plus loin encore les pommes de terre et enfin les tomates. A chaque village sa spécialité. Lors de tous les arrêts c’est une mini-émeute qui se déclenche dès que Fred ou Inno annoncent ce qu’ils cherchent.
A la sortie de Mbeya, nous découvrons la gestion chaotique d’un chantier routier. Circulation alternée toutes les quarante minutes. Pris au piège sans la moindre alternative, nous perdons du temps. Nous essayons bien avec Isabelle de repérer un détour dans le quartier mais en vain. Quand enfin nous sommes autorisés à avancer, le défi consiste à faire le lien entre la carte et la réalité. Pas simple quand les adresses affichées sur les devantures des commerces semblent systématiquement faire référence aux villages suivants. Ainsi, nous galérons tout particulièrement pour trouver la route qui part vers l’ouest aux alentours de Tunduma, la ville frontière avec la Zambie. La carte ne correspond pas aux renseignements que nous obtenons au bord de la route. D’ailleurs certains sont contradictoires. Ainsi, nous faisons un aller-retour de plusieurs kilomètres avant d’être enfin sur le bon axe suite à un ultime renseignement. Mais le temps a passé et la nuit est tombée. Ce n’est pas tout d’avoir trouvé la route qui conduit à Sumbawanga, la prochaine grande ville, encore faut il trouver un endroit pour bivouaquer.
Commence alors une nouvelle quête. Nous roulons plus de trente kilomètres où se succèdent villages et terres cultivées. Pas la moindre zone de plat ! Même les cours d’école sont réduites à leur plus simple expression. Plusieurs fois, nous testons des pistes, en vain. Finalement, vers 21h30, Fred « abandonne » et arrête son Land Cruiser dans un champ moins bosselé que les autres et épargné par les brûlis. Nous installons nos tentes en file indienne sur la piste. Une ornière dans un sol sablonneux est finalement pas plus mal pour dormir. Le repas est simplifié pour réduire le temps de préparation. Il est 22h30 quand nous rejoignons nos sacs de couchage. Sauf que vers minuit, quelques dizaines d’autochtones débarquent bruyamment. Un réveil inattendu et un peu inquiétant. Fred et Inno vont palabrer trois bons quarts d’heure pour les rassurer en leur expliquant ce que nous faisons là. Et le calme revient. Quelle journée !!