Reco Tanganyika (2)

Publié le par Jérôme Voyageur

Jeudi 7 Septembre, à l’ouest Tunduman

 

Etonnamment après la visite nocturne, personne n’est là au moment où nous nous réveillons et plions le camp. Nous ne nous éternisons pas et reprenons notre progression sur cette route quasi neuve. Le paysage finit par changer à une centaine de kilomètres de Tunduman. Entre les villages, les cultures ont laissé place à de jolis lieux sauvages et vallonnés, plantés d’acacias, qui auraient été parfaits pour un campement sauvage. Mais la distance à parcourir était trop importante. Les quelques petites villes servent à refaire le plein, histoire de sécuriser la logistique et à dénicher le plus de chapatis possible. La pause du midi nous permet de goûter les premiers.

Alors que depuis plusieurs dizaines de kilomètres nous sentions que la route était de plus en plus à l’état de chantier, arrivés à Kisi, nous basculons brutalement sur une piste de latérite, bien heureusement large et à peu près roulante. Quatre vingt kilomètres pour rejoindre le parc national de Katavi, le traverser et rejoindre le quartier général des gardes implanté à Sitalike, à l’entrée nord du parc. Quelques rares animaux, principalement des babouins et des girafes, se montrent timidement. Nous découvrons que le paiement du permis doit se faire obligatoirement par carte bancaire ; nos espèces en dollars prévues à cet effet vont repartir en France intactes. Fred profite de notre passage chez les rangers pour commencer à glaner des informations pour Mahale. Puis nous repartons pour rejoindre notre lieu de campement situé à une cinquantaine de kilomètres plus au sud, près de la rivière Katuma. Néanmoins, à peine arrivés sur le pont situé à deux cents mètres du QG, nous stoppons déjà. Ce qui reste de la rivière qui coule en dessous est envahi par des dizaines d’hippopotames ainsi que quelques crocodiles. Nous ne pouvons pas rester trop longtemps. Il faut près d’une heure pour atteindre notre camp au lieu appelé Ikuu. Ce soir nous montons les tentes à la lumière du jour, c’est tout de même plus agréable et plus facile.

La concentration d’hippopotames sous le pont n’était rien comparée à la colonie que nous découvrons dans le marigot qui s’est formé à la place de la Katuma non loin du camp. Nous allons être bercés par leurs grognements pendant tout notre séjour. Nous nous installons à Ikuu pour cinq nuits. Ce soir un bruit particulier retentit : une éléphante visiblement très énervée barrit très puissamment sans que nous ne sachions pourquoi. La journée se termine sur un toujours aussi succulent filet de bœuf grillé juste comme il faut, ce qui lui donne un bon goût de reviens-y.

de Sitalike à Ikuude Sitalike à Ikuude Sitalike à Ikuu
de Sitalike à Ikuude Sitalike à Ikuude Sitalike à Ikuu

de Sitalike à Ikuu

Vendredi 8 Septembre, Katavi National Park, Ikuu Camp

 

La nuit a surtout été animée par les hippopotames comme nous nous y attendions. Nous sommes quelques-uns à avoir cru entendre un lion, beaucoup moins à avoir discerné la hyène venue chaparder la bouilloire restée sur le feu encore fumant. Fred vient nous réveiller vers cinq heures quarante cinq. Nous prenons le petit-déjeuner dans la foulée histoire d’être prêts à démarrer dès six heures trente, l’heure « légale » pour circuler sur les pistes. C’est parti ! Direction la rivière ou plutôt son lit. En cette fin de saison sèche, elle ne s’écoule plus, transformée en une succession de mares plus ou moins grandes. Des dizaines et des dizaines d’hippopotames sont là, vautrés dans la boue ou bien gambadant au sec en des proportions jamais vues ailleurs. A croire qu’ici ils sont différents des autres pour passer autant de temps hors d’eau en pleine journée. C’est ainsi que nous observons une mère avec son tout petit approchant l’eau très timidement avant de rebrousser chemin.

Parvenus de l’autre côté du lit, nous déclenchons une cavalcade d’hippos par notre simple présence, façon troupeau de buffles. Je ne me souviens pas en avoir vu autant cavaler ainsi. Les oiseaux restent plus calmes. Les bihoreaux n’ont même pas réagi à l’effervescence. Au cœur du lit, les escadrilles mangent tranquillement. De temps en temps, nous assistons à un gracieux décollage groupé. Il y a des aigrettes, des hérons, du cendré au goliath, des cigognes à bec jaune ainsi qu’un jabiru solitaire. Une fois sur l’autre rive après avoir traversé le micro-gué que constitue le ruban d’eau qui persiste encore le long de cette rive, nous atteignons les abords de la grande plaine de Katisunga autour de laquelle sont installés deux des principaux hébergements du parc, un camp de tentes monté à l’année côté piste d’aviation, et un lodge en bois à l’opposé, mais tous deux avec vue. Nous commençons à apercevoir des groupes de ruminants. Les premiers sont des zèbres, puis des cobs Defassa. Viennent ensuite les impalas et quelques rares cobs des roseaux que nous confondons avec les précédents. Au loin, les jumelles nous permettent de deviner deux hyènes en maraude. En fait cette immense étendue grouille de vie. Au loin quelques éléphants sortent en lisière de forêt. Au cœur de la plaine, nous pouvons deviner quelques phacochères et des calaos terrestres, ainsi qu’une outarde Korhans.

Sur le chemin du retour, nous croisons nos premiers buffles, plutôt placides à l’ombre des arbres. La fin du parcours est surtout ornithologique. Fred nous laisse en surplomb des hippos d’Ikuu. Le spectacle de ces dizaines de masses littéralement tankées dans la boue est irréel. Comble du paradoxe, le puits a été construit juste au-dessus d’eux à quelques mètres à peine. Néanmoins, ils ne réagissent pas le moins du monde quand quelqu’un vient pomper de l’eau. Direction le campement pour la traditionnelle salade, avant une courte sieste et surtout une bonne douche décrassante.

Nous attendons quinze heures trente avant de repartir toujours le long de la rivière mais dans le sens opposé à ce matin. Très rapidement Fred pense avoir vu un léopard au loin, de l’autre côté de la rivière. Branle-bas de combat. Nous filons bon train sauf que notre piste s’éloigne des lieux présumés de l’apparition. Nous finissons par trouver un pont dont la densité de faune ne nous stoppe même pas. Puis nous empruntons la piste « sur berge » de l’autre côté de la rivière. Enormes crocodiles, aigles pêcheurs et autres sont abandonnés à leur sort. Parvenus au lieu supposé de la première observation, pas la moindre trace de léopard. Seuls deux crocodiles sont là. Il nous faut donc rebrousser chemin jusqu’à être intrigués par la présence d’au moins quatre vautours branchés, le tout sans carcasse visible. En avançant un peu sur la pointe qui barre le cours de la rivière, nous finissons par apercevoir en contrebas une lionne « attablée » sur un jeune hippopotame. Elle semble avoir du mal à mordre et le souffle court.

En poursuivant la piste, nous sommes arrêtés par un groupe de mangoustes rayées bien peu farouches, qui restent un bon moment au milieu de la piste. Du coup, nous finissons par discerner sur notre droite une première tête léonine, toute jeune. Après moult mouvements, nous en dénombrons sept, deux femelles adultes et deux fratries, la plus jeune ayant peut être six mois. Nous restons un long moment à les observer. Tous semblent surtout préoccupés par la sieste. Nous les abandonnons pour rejoindre le pont d’Ikuu, centre d’une intense activité. Dans ce qui reste de la rivière, des dizaines d’hippopotames trempent dans une eau bien sombre alors que la plage centrale sert de nurserie pour les plus jeunes. Marabouts et cigognes à bec jaune occupent les rives et parfois les dos d’hippos. Un couple d’œdicnèmes et quelques hérons cendrés complètent le tableau. De l’autre côté du pont, ce sont plutôt les crocodiles qui occupent la place ainsi que les cigognes. Après avoir arrosé un aussi beau spectacle avec une bière fraiche tout juste sortie du réfrigérateur, nous retournons voir les lions toujours aussi actifs puis la lionne et sa carcasse. C’est sur cette dernière observation que nous rejoignons le camp.

autour de la Katuma Riverautour de la Katuma Riverautour de la Katuma River
autour de la Katuma Riverautour de la Katuma River
autour de la Katuma Riverautour de la Katuma Riverautour de la Katuma River
autour de la Katuma Riverautour de la Katuma River

autour de la Katuma River

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