Rendez-vous en terre inconnue ... sur la terre de nos aïeux (9)
Grado, 22 Septembre
Pour la dernière étape de la journée, nous laissons derrière nous l'histoire italienne pour passer à quelque chose de plus futile. Il eut été dommage de ne pas aller voir de plus près la mer Adriatique toute proche. Nous n'avons qu'une grosse dizaine de kilomètres à parcourir. Encore une fois, je suis étonné par le tracé quasi rectiligne des routes.
Environ à mi-chemin, nous bifurquons légèrement à l'approche du hameau de Belvedere avant de bifurquer une nouvelle fois quelques centaines de mètres plus loin, à l'approche de la lagune qui précède les eaux "maritimes". Avant d'aller plus loin, je quitte la route pour faire une courte halte près du restaurant installé près de la berge. Ainsi, en quelques pas, nous avons un panorama sur la lagune, les petites îles à proximité et, bien évidemment, un aperçu de la digue qui nous attend avec, à l'horizon, les immeubles de Grado. Malheureusement, le soleil s'est dissimulé depuis notre départ de l'Aquilée, laissant place à une couverture nuageuse bien moins photogénique. Il faudra faire avec ...
Nous reprenons donc notre avancée sur un peu plus de deux kilomètres. Dans ce sens Nord-Sud, il est parfaitement impossible de s'arrêter. Il faudrait pour cela être piéton ou cycliste. Impossible donc d'immortaliser le seul arbre qui pousse sur cette étroite langue de terre. Dans l'autre sens, il y a bien deux zones d'arrêt temporaire mais je n'ai pas l'intention d'y repasser. Nous "touchons terre" près d'une marina, qui se révèle ne pas encore être notre but, un dernier pont reste à franchir avant d'entrer enfin dans Grado, cité balnéaire, entre lagune et mer. Immédiatement, nous constatons qu'il y a foule, la circulation est ralentie.
Dès que je peux, je m'engage dans les rues sur la droite, espérant bien trouver un endroit pour nous arrêter au coeur de la cité, si possible pas trop loin d'une des diverses marinas, histoire de voir quelques bateaux de près. C'est là que les ennuis commencent. Les places disponibles sont inexistantes. Quand je jette un oeil aux panneaux, les tarifs horaires sont mêmes exorbitants. Une question me vient: comment est-on censé faire quand on veut venir à la plage à Grado? On vient à pied sur des kilomètres? Edifiant! Je tourne, contourne, détourne et retourne. Après un quart d'heure à parcourir une bonne partie de la ville, je finis par songer à quitter les lieux sans même visiter quoi que ce soit. Et puis, alors que je n'y croyais plus, j'aperçois une place acceptable. Supposant une surveillance stricte dans un lieu si fréquenté, je ne prends pas le risque de ne pas déposer un ticket derrière le pare-brise.
Enfin, nous allons pouvoir nous balader et découvrir ce que la ville peut nous offrir. Le hasard de nos circonvolutions a fait que nous ne sommes finalement qu'à une centaine de mètres à peine à vol d'oiseau de la plage. Encore une fois, les apparences sont trompeuses. En débouchant du parc qui jouxte la rue où nous venons de nous arrêter, nous faisons face à un long bâtiment qui nous barre le chemin et la vue. Il faut le remonter sur une centaine de mètres avant de trouver un passage qui mène à la promenade côtière. Enfin nous y sommes! Malgré la journée de repos dominical, les baigneurs sont rares dans l'eau. L'essentiel des personnes restent sur le sable, utilisant une des nombreuses plages "privées" avec leurs collections de transats. Il faut dire qu'à cette heure, la météo n'incite plus vraiment à la baignade. Nous faisons néanmoins tâches en marchant au bord de l'eau avec nos chaussures de marche, nos pantalons et nos sweats à côté d'hommes et de femmes en maillot de bain. Un petit détour sur une des jetées qui s'avancent vers les flots nous permet de constater que l'eau est plutôt claire.
Le front de mer est conforme à ce qu'on pouvait attendre, succession d'immeubles en béton le long de la promenade derrière la plage. Et quand nous sommes contraints d'y remonter, nous sommes immergés dans une foule plus dense. Les boutiques alternent avec les hôtels quand il ne s'agit pas de résidences balnéaires. Pas vraiment ce que nous préférons. Autant dire que nous sommes plutôt surpris en débouchant sur la piazza Marin, tout près de l'extrémité Ouest de la ville. Au milieu de celle-ci surgissent des ruines d'une ancienne basilique: les quelques centimètres de murets qui subsistent rappellent bien la forme d'une église, et encadrent plusieurs surfaces encore recouvertes de mosaïques. On est loin de la richesse d'Aquilée mais tout de même. La maison ancienne toute proche mérite une courte visite: elle abrite des expositions culturelles temporaires.
C'est à ce moment-là que le soleil parvient à nouveau à darder quelques-uns de ses rayons à travers les nuages.
Dès lors, le quartier parait plus authentique quand nous nous engageons dans la via Gradenigo, aux charmantes plaques de rues. Non loin de là, nous commençons à apercevoir la pointe d'un clocher. Il ne nous faut pas longtemps pour rejoindre la petite place où se trouvent non pas une mais deux églises à quelques mètres l'une de l'autre. Mais avant de les rejoindre, nous sommes intrigués par la croix fichée au sommet de ce piédestal minéral au milieu du passage. Contrairement à celles que nous avons l'habitude de voir, celle-ci possède trois branches horizontales. C'est une croix dite papale, et si j'en crois les lettres gravées dans la base, elle serait associée à Jean-Paul II.
Nous avançons alors sur la droite vers la basilique di Santa Eufemia érigée en briques qui lui donnent une agréable et chaleureuse apparence. Son campanile est accolé à la façade tandis que nous découvrons l'existence d'un baptistère octogonal à proximité. A l'intérieur, nous sommes surpris par le contraste de la décoration, un mélange de sobriété extrême, sûrement des effets de rénovation, sans oublier la toiture apparente, et de riches éléments par ailleurs. Pêle-mêle ce sont d'abord les colonnes en marbre qui attirent l'oeil de part et d'autre de la nef principale, puis le sol presque intégralement recouvert de mosaïques (ici, on ne semble pas les protéger outre mesure), une chaire hexagonale de style mauresque décorée d'un damier rouge et blanc. Et pour couronner le tout, dans le choeur c'est une grande fresque qui occupe tout l'espace au-dessus de l'autel.
Quelques "grosses" dizaines de pas nous séparent de l'église Santa Maria delle Grazie. Engoncée qu'elle est dans le quartier, nous profitons moins bien de sa façade, faute de recul suffisant. Néanmoins, elle semble avoir une architecture similaire à sa grande voisine. La différence est surtout à l'intérieur où les parois sont restées en briques apparentes. Quant aux mosaïques, nous ne pouvons en distinguer qu'au pied des murs latéraux, en contrebas du sol de la nef. Ce lieu est tout de même surprenant. Toutes ses dimensions sont réduites, sauf sa hauteur, comme si quelqu'un avait pressé les côtés et que la matière n'avait eu d'autre choix que de monter ...
En repartant vers la grande plage, nous repassons sur le côté de la basilique où une autre place permet de l'admirer de toute sa longueur. Puis il faut affronter la foule qui semble se masser dans les rues commerçantes. Vite, vite, où est la promenade côtière? Là, nous respirons mieux. Nous longeons à la fois les cabines de plage, dont certaines paraissent bien étroites, et les villas colorées d'autre part.
Après un dernier coup d'oeil à la mer, nous rejoignons la voiture. Il reste à faire comprendre au GPS où ne pas passer. Cela n'aurait encore intérêt de faire le même chemin dans l'autre sens. Alors nous partons plein Est en direction de la Slovénie pour remonter la langue de terre qui se termine à Grado jusqu'au continent. Ce faisant, nous réussissons à nous éloigner suffisamment pour que l'itinéraire de retour soit inédit. Nous longeons ainsi l'aéroport international de Trieste que je n'imaginais pas aussi éloigné de sa ville. Plus tard, nous distinguons au dernier moment une vaste nécropole militaire au bord de la route, à Redipuglia. La suite de la route est plus monotone si ce n'est que nous rejoignons Udine par des quartiers que nous n'avions pas encore traversés.
De retour à l'hôtel il est temps de refaire les valises pour le voyage du retour. Toutes les bonnes choses ont une fin. Débarrassés de cette corvée, nous pouvons rejoindre le centre pour notre dernier restaurant en terre frioulane. C'est pendant le repas que nous finissons par entendre de la musique qui semble émaner de la piazza della Liberta. Seraient-ce les festivités du marathon? Après avoir réglé l'addition, nous montons jusque-là pour en avoir le coeur net. Effectivement, le podium qui nous gâchait la vue est en pleine effervescence. Toutes les chaises sont occupées ainsi que les marches les plus hautes. Sur scène, la musique accompagne divers défilés de mode entrecoupés de morceaux de violon. Nous restons donc un moment à profiter du spectacle avant que la gourmandise nous prenne. Nous nous dirigeons donc vers le piazza Matteoti où nous dénichons un glacier. A cette heure de la soirée, un dimanche, elle se révèle bien plus calme qu'hier. Nous pouvons donc déguster nos glaces tranquillement assis sur le bord de la fontaine centrale, à regarder les enfants courir autour ou à l'intérieur (elle était vide!).
Cette fois, il est l'heure de rentrer nous reposer, après une dernière traversée de la place du 1er Mai .