A la découverte des trésors du Levant (8)

Publié le par Jérôme Voyageur

Désert du Wadi Rum
Désert du Wadi Rum

A 14 heures, nous embarquons dans un minibus direction le sud. Le paysage reste le même : des étendues sablonneuses parsemées de collines rocheuses particulièrement érodées. Au bout de deux heures, nous atteignons le centre des visiteurs du Wadi Rum où il faut récupérer son billet d’entrée avant de rejoindre son campement. Nous allons passer la nuit au Captains Camp. Pour l’atteindre depuis la route, il faut marcher une vingtaine de minutes en commençant par une bonne dune au sable bien mou. A mi chemin, nous passons près de ce qui ressemble à un gros champignon rocheux. La mise en bouche est sportive avant d’atteindre le campement, qui se retrouve de ce fait éloigné du bruit de la route. Les grandes tentes sont installées au pied d’un gros rocher qui sert d’assise aux sanitaires et au coin repas. Un thé à la sauge nous est servi en guise de bienvenue : il se révèle bien bon aussi. Après avoir posé les sacs dans des tentes surchauffées, arrivés à dos de 4*4, je pars m’installer sur un rocher à une centaine de mètres en attendant que le soleil se couche. Vu la configuration des lieux montagneux devant moi, le résultat ne sera pas terrible mais la sérénité de l’endroit est plus qu’appréciable, à part peut être quand quelques caravanes de 4*4 passent au loin.

Retour au camp une fois le soleil couché pour nous dépoussiérer de la journée avant de nous installer dans la semi-grotte qui fait office de coin repas. Les matelas et les coussins sont confortables. Ce soir, ce sera une spécialité bédouine, le massah, à consommer directement dans le plat collectif posé sur le tapis. Nous avons même une cuillère pour ceux qui ne seraient pas tentés par la méthode traditionnelle avec les doigts. Ce plat à base de riz et de poulet, se révèle excellent. Mais difficile de venir à bout d’un tel plat aussi copieux. La soirée se termine avec du thé à la sauge, ma foi bien bon. Il ne reste plus qu’à rejoindre un lit confortable pour une douce nuit silencieuse. Les étoiles ne sont pas nombreuses au rendez-vous dans un endroit pourtant préservé du sur-éclairage.

Vendredi 22 octobre 2010, Wadi Rum

Si le début de nuit fut chaud sous ces tentes chauffées toute la journée par le soleil, la fin de nuit fut au contraire plutôt fraîche et l’édredon s’est révélé bienvenu. Quel calme pour passer une bonne nuit. Le déjeuner est pris de la même façon que le dîner d’hier soir. Je surprends une fois encore par ma relative souplesse pour manger dans cette position.

Une fois les bagages rassemblés près de la cavité, nous partons marcher dans une petite portion du Wadi Rum. Chèche sur la tête, nous nous dirigeons d’abord vers l’ouest. L’idée est de contourner le massif qui nous fait face. Heureusement, il n’y a pas de dune à gravir. Celle d’hier nous a cassé les jambes après la matinée de marche à Petra. Le sable sous nos pas reste néanmoins souvent très mou. La ballade se révèle quand même physique.

Ce site est vraiment splendide : le paysage est parsemé de hautes falaises de grès ocre, parfois fortement érodées selon leur orientation. Entre elles s’étirent des langues de sable aux couleurs multiples, tantôt rose-rouge, tantôt plutôt jaune, voire même blanc. Même sa finesse varie selon les endroits. Ces moments de plénitude sont malheureusement entrecoupés des pétarades d’un convoi de 4*4 ou de l’ULM qui survole les lieux. Des petites taches vertes, jamais bien hautes, ajoutent une nouvelle touche de couleur sous le bleu azur du ciel. Nous trouvons même deux petites fleurs blanches, totalement inattendues en plein désert. L’observation attentive du sable non piétiné témoigne d’une intense activité : oiseaux de tailles diverses, gerbilles, renards ainsi que les dromadaires qui servent pour les ballades. J’ai parfois l’impression d’être sur une mer de sable où vogueraient d’immenses navires de pierre. A part quelques lézards, la faune se fait rare. Peut être fait il déjà trop chaud. Il faut dire qu’en dehors de l’eau, il est une autre denrée rare dans le Wadi Rum : l’ombre. Nous profitons d’ailleurs de la première rencontrée pour faire notre première pause.

Alors que nous commençons à nous diriger vers un défilé, Adnan nous montre des gravures rupestres au bas d’une falaise. Nous y distinguons divers animaux : dromadaires et bouquetins ainsi que quelques personnages. Elles sont d’origine thamudéenne, les cousins des nabatéens. Alors que nous cheminons dans l’ombre du défilé, nous apercevons un groupe de véhicules arrêtés au débouché d’une vallée encaissée en cul de sac. Ce n’est pas tant son café-boutique qui présente de l’intérêt mais le gros bloc de pierre à l’entrée. Nous y voyons deux visages sculptés : celui de Lawrence d’Arabie et celui du roi Hussein 1er. Un peu plus loin, un bloc plus modeste représente le chef bédouin. Tous ont œuvré à la création de la Jordanie. Il ne nous reste plus qu’à rejoindre le campement, caché par une petite dune.

Alors que nous arrivons, un autre groupe de touristes Terdav, débarque pour s’installer. Il va falloir se serrer sous l’auvent. Et pour le repas du midi, on oublie la méthode traditionnelle. Ait installe un buffet dans une des grandes tentes. Ceci nous permet d’échanger quelques impressions avec les autres. Mais comme toute bonne chose a une fin, il faut déjà quitter ces lieux. Tandis que nos bagages sont chargés à bord du 4*4, nous repartons à pied vers l’esplanade qui sert de parking temporaire. Vu d’en haut, la grosse dune me parait encore plus impressionnante qu’hier quand nous avons peiné à la franchir. A l’arrivée nous attend le minibus. Il faut quatre heures pour retraverser le pays jusqu’à Madaba, aux environs d’Amman. Nous pensions être seuls dans cet hôtel tout récent, mais finalement nous retrouvons d’autres touristes au moment du repas. Très gentiment le réceptionniste nous met à disposition son ordinateur pour profiter un peu d’internet. Malheureusement, cela rame particulièrement. Je me demande comment le wifi arrive à fonctionner. La nuit se révèle très bonne sur une literie parfaite et isolé par un double vitrage efficace.

Samedi 24 octobre, Madaba

Ce matin, nous avons quartier libre jusqu’à neuf heures. J’en profite pour repousser un petit peu le réveil. Direction ensuite le centre ville finalement assez proche. Grâce au plan fourni par la réceptionniste, je rejoins rapidement l’église Saint Georges. Extérieurement, cette petite église orthodoxe grecque n’a rien d’impressionnant. Son iconostase n’a rien non plus de transcendant. En revanche, le billet d’un dinar jordanien se justifie par le sol de l’édifice. Une partie est couverte par une large mosaïque ancienne représentant la carte de la Terre Sainte telle qu’elle était vue au 6ème siècle. Cette pièce unique est le vestige d’une ancienne basilique byzantine. Sans le panneau explicatif à l’extérieur, il serait bien difficile de tout reconnaître avec les légendes en grec. J’arrive tout juste à déchiffrer Bethléem tandis que Jérusalem est une évidence par sa taille et sa position quasi centrale. Madaba est aussi la capitale de la mosaïque. Il est possible d’en trouver un peu partout dans la ville. En flânant dans les boutiques, je fais la connaissance d’un vieil homme, banquier retraité et reconverti au commerce touristique, qui m’invite directement à déguster un thé et quelques pâtisseries. Nous devisons un petit moment. Il me fait même une ristourne quand je trouve un petit souvenir à ramener.

Nous retrouvons ensuite le véhicule et Adnan à l’heure dite pour rejoindre le Mont Nebo à quelques kilomètres seulement. Le principal intérêt de l’endroit est religieux, surtout depuis que l’ancienne basilique est en restauration. Ce lieu principalement planté d’oliviers aurait vu la mort de Moïse. Quelques mosaïques prélevées aux alentours y sont exposées après restauration. De la terrasse située à l’entrée de la basilique, nous avons un panorama, certes réduit par les nuages, sur la Terre Sainte : à gauche l’extrémité nord de la Mer Morte, le Jourdain qui se devine à travers la vallée et Jéricho juste en face à seulement quelques dizaines de kilomètres.

Nous repartons ensuite vers Amman, destination finale de notre voyage. La capitale jordanienne semble tentaculaire. Nous avons l’impression de rouler longtemps en ville avant d’atteindre la ville basse. La circulation est anarchique. Cela doit être épouvantable de conduire ici. Et puis rien n’est plat : la ville est un assemblage de collines pentues sur lesquelles sont agrippées les habitations. Autant dire que le calme et l’air pur du sud sont de lointains souvenirs. Nous marchons un moment le long des souks, en fait de simples boutiques le long d’une avenue, jusqu’à atteindre le théâtre romain. Contrairement à ce que je craignais, il est loin d’être insignifiant. Son mur de scène a quasiment disparu mais ses gradins, qui pouvaient accueillir jusqu’à cinq milles personnes, sont bien conservés. Ils se révèlent même très escarpés lorsque nous décidons d’y monter. De l’Odéon situé juste devant, nous voyons assez peu de choses du fait d’un immense chantier. En revanche, la citadelle se distingue bien au sommet de la colline juste en face. Nous récupérons le véhicule pour y monter, un supplément au programme.

Nous partons d’abord vers le palais omeyyade. Une coupole de bois le recouvre désormais. A l’intérieur, nous pouvons comparer le travail de restauration sur les parois sculptées par rapport à celles laissées d’origine. A nouveau il nous semble entendre un son écossais : deux jordaniens sont effectivement en train de jouer ce qui ressemble à Flowers of Scotland à la cornemuse. Derrière le palais, nous jetons un œil à une maison d’habitation typique de l’époque omeyyade : un patio central avec une citerne, une longue colonnade et des pièces distribuées tout autour. En repassant devant le palais, il faut deviner ce qui était une mosquée. Nous n’en distinguons que des bases de colonnes et un embryon de mirhab. Dans le musée archéologique que nous imaginions très limité vu sa taille, nous faisons de très belles découvertes, en particulier quelques-uns des rouleaux de Qumran. Seuls les japonais, qui se photographient dans tous les sens sans respect aucun pour les collections, sont venus troubler cette très instructive visite. En sortant nous distinguons ce qui reste de la monumentale statue d’Hercule : trois doigts et un bout de genou. Juste derrière se dressent encore quelques colonnes du temple de Zeus.

Il est alors temps d’aller manger dans un restaurant typique couru tant des touristes que des locaux, mais pour cela il faut bien s’éloigner du centre, à tel point que nous finissons par douter de notre destination. Une dernière fois, nous ne repartons pas avec la faim. Direction l’hôtel Al Manar dans le quartier bancaire. J’en profite pour comater, le sac étant refait depuis hier. Je ressors d’abord en repérage puis plus tard pour prendre notre dernier repas jordanien. Le service est suffisamment lent pour que nous n’ayons pas à attendre le transfert vers l’aéroport. Surtout que nous découvrons qu’il a encore été avancé. Lorsque le minibus arrive, nous avons la surprise de revoir Hashem. Une quarantaine de minutes plus tard, nous arrivons à l’aéroport international Queen Alia d’Amman. De nouveau la sécurité est densifiée : à l’entrée du complexe aéroportuaire par l’armée, à l’entrée dans l’aérogare avec un contrôle de tous les bagages. Un dernier a lieu entre le duty free et la salle d’embarquement.

Enfin à bord, en plein milieu de la nuit, direction le froid de la France. A la hauteur de ce que nous pouvions craindre. Dès la passerelle, nos souffles forment de la vapeur d’eau : riche idée que d’avoir pris la veste à bord. A cette heure-ci, il n’y a pas foule dans l’aérogare. O surprise, des RER quittent l’aéroport ! Il faudra juste en changer à la gare du Nord. Mais au moins, j’arrive à rentrer chez moi vers 8h. Hors de question de dormir : la journée de dimanche va être longue !

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